On ne confondra pas Marc Papillon de Lasphrise avec Papillon Almanque (1487-1559), le valet de chambre de François Ier, ou avec Papillon de la Ferté (1727-1794), l'intendant des Menus-Plaisirs, et moins encore avec Jules Papillon, membre obscur de la Société historique de l'Aube. Non, on ne confondra pas. D'ailleurs la confusion n'est guère possible.
Papillon de Laphrise (1555-1599 ?), rendu à la notoriété par Viollet-le-Duc et par l'érudit Prosper Blanchemain, est un personnage extraordinaire dont il ne nous reste malheureusement que quelques poèmes, les plus notables ayant été réunis dans ses Premières oeuvres poétiques du Capitaine Laphrise (1597).
Outre son nom si évocateur — qui fleure les découvertes naturalistes autant que l'eau-de-Cologne —, ce personnage précieux fut un voyageur de race qui traversa de part en part l'Europe, visita, a-t-on dit parfois, l'Afrique et s'en fut jusqu'en Asie.
Natif du petit fief de Laphrise, lès Amboise, dont il prit le nom, Marc de Papillon porta les armes dès l'âge de douze ans et fut, selon ses dires, vaillant soldat et capitaine intrépide. Nous n'avons pas de mal à le croire.
(...) jeunet desjà ardant de belle flâme
D'ambition guerrière où s'adonnoit mon ame,
Je traversay les mers sans craindre le méchef,
Afin d'avoir un jour ce digne nom de chef.
Il n'eut pas que cette qualité. Quand, plus tard, vieilli sur les champs de bataille, il se retira chez lui, "accablé d'infirmités" nous dit Viollet-le-Duc, il poursuivit ses rimailleries, tout en se gardant bien de jouer l'écrivain. Sa "muse soldarde" servait le gentilhomme, qui n'avait que faire des scholastes. C'est qu'il avait vécu, lui. Et l'on peut s'en convaincre en poussant jusqu'à Nouvelle tragi-comique numérisée sur Gallica.
Pour l'heure, c'est à un recueil d'énigmes apparemment égrillardes que nous avons droit, avec des collages de Claude Ballaré qui rappelle la belle époque des collages surréalistes et belges. Jouant des ambiguités du langage et des sens cachés, le capitaine Papillon nous pousse à imaginer des cochoncetés là où il décrit, ma foi, des actions toutes pures.
On voit bien le malicieux... Exemple :
Madame le void rouge estant en grand'chaleur,
Le prend en pleine main pour le mettre en sa fente,
Puis ayant d'un bon coup reçu ceste liqueur,
Soufflant souspire d'aise, & n'est plus si ardente.
Nous vous laissons deviner.
Marc Papillon de Lasphrise Les Enigmes licencieuses. Illustrées par des collages de Claude Ballaré — Bordeaux, Finitude, 2008, 112 pages, 20 euros
1 De grapheus tis -
Pour ce soupir d'aise à prolonger :
« Puis il me fend soudain, mais quand le bon morceau
Est entré dans le trou, on sent une douce eau,
Qui fait joyeusement changer de contenance.
QU'EST-CE ?
2 De camarasa -
On peut, je pense, encore se procurer quelques exemplaires de L'Allusion, de Papillon de Lasphrise, éditions Champavert, 1995, à la librairie Champavert, 2 rue du Périgord, 31000, Toulouse.
3 De Orlando Curioso -
Il y eut aussi une dynastie Rouennaise de Papillon graveurs sur bois au XVIIe et au XVIIIe siècle. Ils inondèrent la production littéraire de bandeaux, de culs de lampe et de lettrines. L'un des membres de cette dynastie, Jean-Michel, publia un "Traité Historique et Pratique de la gravure en bois," Paris, Simon, 1766, dont on dit le plus grand bien (il existe une édition moderne).
Quant à l'énigmatique soupir d'aise rapporté par Grapheus tis, il n'est sûrement pas dû à ce à quoi l'on pense, mais je ne sais point à quoi car je suis nul en pseudo-cochonnes énigmes.
4 De Du poil aux genoux -
Juste pour signaler qu'on trouvera réponse à l'énigme posée dans la revue Triages N° 17. (Article d'Alexis Pelletier)
Ah vive le vin cleret !
Et merci pour toute la variété, les découvertes et les surprises de l'Alamblog.
bien cordialement
Du Poil aux Genoux
Geneviève et Jean-François