La vie des lettres continue (9 septembre 1939)

faussemanoeuvre.jpg Va bene ! Les blindés lisent aussi.



LA VIE DES LETTRES CONTINUE

La vie littéraire s’était presque complètement arrêtée au début de la guerre de 1914, et n’avait repris que lentement. Il ne semble pas devoir en être de même cette fois-ci.


Les librairies sont ouvertes
Beaucoup de librairies sont ouvertes, et ont immédiatement adapté leur étalage aux circonstances. On a mis en vedette tous les ouvrages et brochures de publication récente sur la Pologne, sur l’hitlérisme, sur le redressement français. Les Pleins pouvoirs de Giraudoux sont en bonne place. Des acheteurs se présentent-ils ? Plus qu’on ne croirait, nous a-t-on dit, au cours d’une rapide enquête que nous avons faite chez quelques libraires parisiens.

Que lit-on ?
Un libraire proche de la gare Saint-Lazare nous répond :
- Ce que nous vendons le plus, évidemment, ce sont des brochures qui renseignent le public sur la défense passive et la protection contre les gaz. Mais ne croyez pas que la littérature ne “marche” pas. Les gens s’ennuient pendant les alertes, et il leur faut suppléer au laconisme des communiqués. Aussi voyons-nous entrer des clients. Je viens de vendre un Autant en emporte le vent, et un journal de Green. Un de mes vieux clients m’a même demandé de lui signaler les nouveautés. Nous n’en sommes pas là. Mais cela reviendra. Sur la rive gauche :
- Il y a un courant ralenti de livres sérieux. Peu de romans, mais de l’histoire. de la politique étrangère, des essais.
Près du Théâtre-Français :
Nous vendons d’abord des cartes de Pologne, d’Europe centrale, de la frontière lorraine. Mais on achète aussi des livres des classiques, de la philosophie. Un officier vient de nous demander un Montaigne pour mettre dans sa cantine. Nous pensons qu’on ne cessera pas de lire, que même on lira peut-être beaucoup.

Les éditeurs tiennent
Toutes les grandes maisons d’édition assurent leurs affaires courantes, avec souvent une direction et un personnel très réduits par la mobilisation. Et l’on examinera dès qu’on le pourra, les possibilités d’éditions nouvelles. On nous signale, de divers notés que la vente à l’étranger (Belgique, Suisse, Amérique notamment) est à l’heure actuelle le principal débouché de l’édition française. Voilà qui doit être pris en considération de façon active, en liaison avec les services de la propagande.

Les revues paraîtront
Revues et hebdomadaires re cessent pas de paraître, pour la plupart. Le nombre des pages est seulement réduit, pour sa conformer aux prescriptions du gouvernement. La Revue des Deux Mondes aura â son sommaire du 15 septembre un article sur les forces de la Pologne, et la Revue de Paris publiera à la même date un reportage sur Dantzig par le dernier Français qui y soit allé. La Nouvelle Revue Française, qui avait cessé de paraître en 1914, continuera sa publication régulièrement. Candide a paru, en gardant sa page des « Idées et des Livres ». Gringoire continue également sans modifications, Marianne, aussi. ”Les Nouvelles littéraires et Temps présent” sont annoncés pour la fin de la semaine.



Le Figaro, n° 252, 9 septembre 1939, p. 4.

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