Victor Barrucand contre le racisme aristocratique

tunisbar.jpg ca a pourtant l’air bien droit tout ça…



Une coupure de presse qui en dit long sur le temps “charmant “des colonies…
Il va sans dire que l’Alamblog laisse à cet auteur, tellement altier mais si peu grand, la responsabilité des idées qu’il diffuse. Et l’on sait qui l’on plaint.


Tunis la Blanche


Sous la signature de mon confrère Victor Barrucand, je lisais, mercredi dernier, dans la Dépêche Algérienne, une critique assez sévère de la relation « des impressions tunisiennes» que fait dans le Temps du 29 août, Madame Myriam Harry.
J’ignore si M. Victor Barrucand connaît Tunis, mais ce que je puis affirmer, moi,— ayant habité longtemps, et tout dernièrement encore, cette ville bizarre — c’est que les diverses critiques, formulées par Mme Harry, sont rigoureusement exactes et marquées d’une très grande justesse, en même temps que d’un remarquable esprit d’observation.” Mme Harry, écrit Barrucand, reproche aux Tunisiens de ne rien entendre à l’architecture.” Les Tunisiens européens n’ont nulle connaissance, en effet, de cet art délicat ; si, je me trompe, ils veulent tous, sans aucun doute, avoir une maison qui ressemble, à s’y méprendre, à la Tour de Pise (route du Belvédère).
Ils bâtissent, bâtissent avec une rapidité formidable, entremêlant sans vergogne du style art nouveau avec du style arabe ou du style rappelant vaguement nos anciens châteaux féodaux. Une seule chose les préoccupe, c’est que leur maison soit entièrement peinte en bleu ou en vert, ce qui est d’un coup d’oeil cocasse et bien peu esthétique ! Mme Myriam Harry critique ensuite les Tunisiennes indigènes de ce qu’elles s’empaquettent, se ficellent la figure de bandelettes noires ; la remarque n’est que trop vraie.
Mais, que ne parle-t-elle de leurs chaussures ‘?… Ah ! les chaussures des Tunisiennes et des Tunisiens, riches ou pauvres, quel poème ! Que leur pied rivalise avec celui de Cendrillon, ou qu’il puisse dépasser celui de l’homme-géant, la pointure est toujours la même, celle d’an enfant de 10 ans ! Tant qu’à la forme, identique pour tous, hommes ou femmes, c’est tout simplement une savate ! On voit alors, spectacle réjouissant, la moitié du pied qui dépasse de la semelle, ce qui permet au talon et au bas de traîner tranquillement dans la poussière ou dans la boue !
Parlant enfin de la campagne, Mme Harry s’écrie que ce n’est « qu’une affreuse banlieue ». Mon Dieu, je me demande bien sincèrement comment M. Barrucand veut dépeindre autrement les environs tunisiens ! Je me souviens de les avoir maintes et maintes fois parcourus le nez au vent et le fusil sur l’épaule, ces mornes environs. J’aurais été pourtant un fameux admirateur de cette « luminosité admirable », dont parle mon confrère algérois, mais hélas ! comme ma soeur Anne je ne l’ai jamais aperçue.
J’ai simplement senti les effets caloriques d’un soleil de plomb, j’ai humé délicieusement les odeurs-fétides-d’un lac ignoble, et aussi loin que ma vue a pu.s’étendre, j’ai distingué des montagnes abruptes et dos oliviers rabougris.

Vicomte DE LA JARRE.


Revue mondaine oranaise, n° 177, dimanche 9 septembre 1906, pp. 9-10.

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