Un techno-devin sinon rien

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Attention : le taux de connerie contenu dans ce billet peut se révéler nocif aux lecteurs les plus fragiles.


Le “techno-devin” (1) est souvent délicieux. De loin.
Témoin, celui qui pondit les éboustrifants “11 principes” relatifs au “livre électronique” cueillis sur le blog La Feuille. Pas sûrs qu’ils passent à la postérité, mais ils nous auront bien fait rire.
Ces principes ne sont pas d’Einstein, vous verrez, et nous ne serions pas étonnés que certaines assertions ne mettent quelque alamblogueur en fureur…
Que voulez-vous, l’information avant tout. Lorsqu’un techno-devin nous fait don du brillant produit de son crâne, il s’agit d’en profiter.

Attention, prêts ? partez.

1. Tous les éditeurs sont des moteurs d’information, pas des producteurs d’objets.
“Producteur de devises” est aussi très juste.

2. Un livre n’est plus un objet en tant que tel.
No comment.

3. Les connections entre les livres ajoutent de la valeur à tous les livres.
A tous, sauf à certains. On expliquera un jour à ce joyeux théoricien le problème de la “réception” esthétique, savante, etc. Pas le temps maintenant.

4. Un essai est seulement le début d’une histoire.
Mais j’y songe.. ma grand-mère aussi lorsqu’elle pédale…

5. Même les livres de fiction se connectent à tous les autres livres.
De la candeur du techno-devin. Part 1 : Connectés à tous parce qu’ils utilisent tous (à peu près) langue mots et grammaire identiques ?
De la candeur du techno-devin. Part 2 : le techno-devin est fleur-bleue mais il tient à montrer qu’il a fait ses devoirs: la fiction, il en a entendu parler.
De la candeur du techno-devin. Part 3 : Notons l’irritante condescendance de son “même”. Il n’a jamais entendu parler de métalittérature, de références, de pastiches, et autres farfeluités inutiles dans un Marc Lévy. Poussons plus loin : Flaubert et Maurras ont tous les deux utilisé le mot “chaussure”, et ils en sont lacés ?

6. Des métadonnées profondes de livres valent mieux que le livre lui-même.
Il insiste, l’animal ! Creuse encore, mon garçon, tu verras la lumière tout au fond : sans livre, pas de Sainte Métadonnée !

7. Chaque dollar investi dans les métadonnées profondent (sic) valent une centaine de dollars de ventes futures.
Ce type est décidément le madame Soleil du technobazar. Mais il manque de précision : en dollar de 2009 ou à sa valeur le jour de la conquête de Silicon Valley par les Turkmènes ?

8. Les fonctions d’un livre dicte (resic) le contenant d’un fichier.
C’est vrai pour la fourchette aussi. Une technologie séculaire, mon garçon. (Attention : là, il essaye de nous expliquer, sans avoir bien conscience de ce qu’il dit, que les auteurs doivent dès à présent s’appliquer à écrire pour écran d’e-book, des textes pas trop compliqués, pas trop long, tout ça, hein, coco ?). On n’est toujours pas capable de savoir si une revue électronique est encore une revue, mais ils en sont à redéfinir les fonctions du livre… Ca promet.

9. Les lecteurs ne sont plus des consommateurs passifs.
Non, c’est vrai : avec certains produits technologiques, ce sont des entubés actifs. Mais force est de constater que certains en redemandent. On nous a fait le coup du “ebook c’est super” il y a 10 ans, il y a 5 ans et ça recommence. C’est un marché, paraît-il. Ca a surtout l’air d’être un placard fragile pour technobidouilleurs fumeux. Tant que l’ebook ne sera pas en même temps appareil photo, ordinateur léger, gps, scanner, imprimante et téléphone mobile, voire cafetière, on ne voit pas bien pourquoi on lâcherait nos Oeuvres d’Aubigné imprimées au XIXe et notre vieux Queneau du Livre de Poche.

10. Les lecteurs vendent plus de livres que n’importe quel éditeur.
N’est-ce pas merveilleux ? Bref, tu veux parler du bouche-à-oreille : remarque bien, mon garçon, qu’ils ne touchent pas un sou. Pratique, non ?

11. Ne voir qu’aujourd’hui c’est risquer de perdre demain.
Oh, purée ! Churchill !


Bon, vous en conviendrez, le techno-devin ne se prend pas pour rien.
Ce qui est très irritant chez lui, c’est ce ton péremptoire de gourou petit-bras qui souhaite s’ébouriffer la toison au vent du Temps.
Et pour quoi faire ?
A sait pas bien, le garçon. Il fait sa petite commission idéologique (il ne comprend pas ce mot) en prenant des allures de penseur à litotes.
Ah, il envisage loin (plaf), il pronostique ! Il nous raconte que le livre en papier est mort, parce qu’il est stupide et qu’il ne lit pas plus loin que la presse technochose. Il baigne dans son jus de modernité, il en avale, il dégouline de contentement. Il rayonne de tout ce qu’il contient, notre gourounounet. Une petite lampe à huile en somme.
Sans huile.



Cliquez ici pour connaître l’identité de l’oiseux qui a pondu ces Principes-petit-bras irrémédiablement vains.
Et pour reprendre haleine, allez donc voir le Manifeste du Zaporogue, organisme vivant luttant contre le Livre Unique (comme la pensée).



(1) Une appellation qu’il s’agira de restituer à son légitime inventeur, à propos duquel nous risquons de commettre une confusion (GC ou JDW ?). L’enquête sera faite.

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