Fouterie de poète
La fille
A quoi rêves-tu, sous la couverture,
O mon cher poète, ô mon doux amant ?
Ne suis-je donc plus cette créature
Que tu désirais passionnément ?
Tu mourais pour moi d'un amour immense,
Dans des vers fort beaux... que je n'ai pas lus ;
Notre fouterie à peine commence,
Et déjà, mon cher, tu ne bandes plus !
Tes couilles, je vois, se vident plus vite
Que ton encrier plein de sperme noir ;
Ta pine n'est plus qu'une humble bibite
Indigne d'entrer dans mon entonnoir !
Pourtant, si j'en crois mes propres rivales.
Je réveillerais le plus mort des morts :
D'un coup de ce cul qu'ici tu ravales
Sans en éprouver le moindre remords.
Ma gorge se tient mieux qu'un militaire ;
Mon con est boisé comme l'est Meudon,
Afin de cacher l'autel du mystère
Où l'on officie en toute saison.
J'ai des cheveux roux comme des carottes ;
Des yeux de faunesse émerillonnés,
Qui guignent les vits au fond des culottes
Et des pantalons les mieux boutonnés.
Je possède l'art du casse-noisette,
Qui ferait jouir un noeud de granit ;
Un coup avec moi n'est qu'une amusette :
Quand on est à douze, on n'a pas fini !
Et lorsque mon con a soif de ton sperme,
Lorsqu'il en attend dix litres au moins,
Tu sers une goutte ou deux, puis tu fermes
Le doux robinet des ruisseaux divins !
Est-ce du mépris ou de l'impuissance ?
Es-tu pédéraste ou castrat, voyons ?
Un pareil état m'excite et m'offense :
Donc, descends du lit, ou bien rouscaillons !
Le poète
Je sens les sonnets pousser sur mes lèvres,
A vous contempler dans cet abandon ;
Vous me rappelez les biscuits de Sèvres
Pétris par la main du grand Clodion.
Corrège vous eût peinte en Antiope,
A voir votre pose et vos charmes nus...
Je vous aime ainsi, divine salope :
La Farcy n'a pas de telles Vénus!
Je vous chanterai dans mes hexamètres,
Superbe catin dont je suis l'amant :
Des vers parfumés comme ceux des Maîtres,
Qu'on lit d'une main, tout en se pâmant.
La fille
Conserve tes vers pour une autre muse
Qui se montera mieux le bourrichon ;
Ce n'est pas cela, mon cher, qui m'amuse :
Sois moins poète et beaucoup plus cochon !
Ingrat ! tu m'as mis le foutre à la bouche !
J'allais presque entrer dans le paradis;
Maintenant je suis réduite, farouche,
A me branler... moi ! Que je te maudis !...
Bande ta pine et débande ta lyre :
L'important au lit est de pisser droit ;
La femme n'est pas au monde pour lire...
Le noeud d'un goujat vaut celui d'un roi !
Ah! ! je n'y tiens plus ! le cul me démange !
Qu'on m'aille chercher l'Auvergnat du coin :
Car je veux .sentir le vit de cet ange
Enfoncer mon con, comme avec un coin !
Alfred Delvau
Alfred Delvau Fouterie de poète. - Priapeville, Impr. galante, An III du XXe siècle foutatif.
1 De cls -
Bien tourné... ça vaut, sans contestation aucune, la prosodie des deux autres Alfred, Vigny et Musset. On dirait du Louÿs avant l'heure (zut, lui, ce n'est pas un Alfred, c'est un Pierre).