Luna Western, de Christophe Macquet

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Curieux ouvrage que ce Luna Western de Christophe Macquet. On savait l'oiseau original, on ne se doutait pas qu'il le serait autant qu'il le montre dans le volume broché et bilingue de la maison argentine Paradiso. C'est un régal poétique - au sens de friandise -, une folie - au sens du Grand Siècle -, une cavalcade de mots - au sens de l'automatisme des surréalistes.

Convoquant des figures tutélaires comme Macedonio Fernandez, le prince de la préface (son chef-d'oeuvre, le Musée du Roman de l'Eternelle en compte quatre-vingt-dix neuf, si l'on se souvient bien), mais aussi des Lamborghini et autres Orozco, Macquet commence par multiplier les épigraphes. Bien sûr, il les subvertit en traduisant drôlement les vers et phrases des auteurs susdits dans un immense dérèglement qui n'est pas sans rappeler l'art des traducteurs d'il y a deux ou trois siècles, lesquels faisaient parfois dire ce qu'ils souhaitaient aux écrits qu'ils choisissaient (on en connaît de plus récent d'ailleurs). Christophe Macquet s'autorise tout et surtout le plus inattendu, jusqu'à l'abstrus, en passant par le sibyllin, le dingue et l'impressionnistement cocasse. C'est parfait. Un musée d'images en quelque sorte où l'on empoigne à loisir, un fleuve de mots et de notions où sont scandés le "lard" ou bien encore "l'ardeur des raccourcis", vade-mecum ou passe-partout, on ne sait.

l'ardeur des raccourcis : personne ne m'a suivi : j'ai vérifié : je suis libre comme une martingale : un jeu d'osselets/ l'ardeur des raccourcis : les vérifications volubiles : le foie : la rate : l'estomac : la joie : la vessie/ l'ardeur des raccourcis : tu vois : l'humain : son naturel : il vient directement des seins de Lubna/ l'ardeur des raccourcis : un beau soir bien luné : un beau soir sur le plan : je lève le nez : je la remonte : je la dénonce : je lui fais barba-lustu-benzopyrène-kerida-musth-gélatine-instachic : plusieurs fois : sans succès (...)

Dans cet écrit lunatique, on pèche des formules à se remémorer, des fragments que l'on souligne, des assemblages qui portent l'ensemble sans qu'on s'attarde à se demander pourquoi, ni comment. Parce qu'au fond, cette orgie de mots et de sonorités entraînent l'adhésion sans qu'on y prenne garde. Avec son essai de prosodie hors norme, Christophe Macquet démontre qu'il est un humoriste jusqu'au-boutiste, un comique trapu.


Christophe Macquet Luna Western, excelentemente traducida del francès por Lisandro Llano (bilingue) - Buenos Aires, Paradiso, 2011, 224 p.

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