Quand la poésie versifie la science

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Rencontre, ce jour, à la BnF, avec Hugues Marchal, directeur du collectif consacré à la poésie scientifique publié par le Seuil l'année dernière. Ce sera à Tolbiac, en salle 70 et à 17 h 30. L'entrée est libre.

Pour saluer ce moment, voyez ce que l'on trouve dans Floréal le 31 mars 1923 (n° 13) :

Les Deux Sciences

En quel siècle, vraiment, aujourd'hui, vivons-nous?
Le moindre fait sportif met les gens aux cent coups.
Des boxeurs, notamment, vantant l'expérience,
Nous ne cessons partout d'exalter la science.
Les journaux, à l'envi, pompeux et solennels,
Comme on adore un dieu, lui dressent des autels.
Cette science-là, malgré certains mécomptes,
Semble n'être pour eux que la seule qui compte.
La science du ring!. Ils en parlent souvent,
Mais sans prôner jamais celle de nos savants.
Aussi bien, permettez qu'à bon droit, je m'étonne
De constater, chez nous, l'importance qu'on donne
A ces combats de boxe où, quoi qu'on ait écrit,
Triomphe la matière aux dépens de l'esprit.
Ce n'est pas que je veuille, en moraliste austère,
Médire de ce sport — chacun son caractère
Et je conçois fort bien que le peuple français
Pour tous nos champions désire le succès.
Mais faut-il, à ce point, négliger la Science
Qu'on refuse de lui donner la préférence ?
Alors que, sur le ring, on gagne tant d'argent,
Pourquoi nos professeurs restent-ils indigents ?
Pourquoi voit-on Branly, ce physicien notoire,
Manquer presque de tout dans son laboratoire,
Et madame Curie, aux crédits si mesquins,
Demander du radium chez les Américains ?
Nos savants, cependant, en plus d'une occurence,
Ont su porter bien haut le renom de la France,
Mais, tandis que, par eux, on le voit établi.
Pauvres et délaissés, ils meurent dans l'oubli.
De leur vie, ils ont beau faire le sacrifice,
A peine de la gloire ont-ils le bénéfice !
Rappelez-vous Infroit, ce modeste héros,
A qui les rayons X ravagèrent les os,
Et qui mourut, bravant leurs ondes meurtrières,
Sur un lit d'hôpital à la Salpétrière.
Mais je m'arrête ici, et je vous dis adieu,
Car j'aurais trop à dire, et ce n'est pas le lieu.
J'ai voulu simplement montrer, par ces paroles,
Qu'en dehors de la boxe, il est d'autres idoles :
Celles qui, de la France, ont vraiment mérité,
Et qui n'ont qu'un seul but : sauver l'humanité !

Victor Vallier & René Buzelin

Hugues Marchal dir. Muses et Ptérodactyles. — Paris, Le Seuil, 660 pages, 32 €

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