Victor Margueritte sur J.F. L. Merlet

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La Tragique Aventure
paraît en librairie

Nos lecteurs n'ont pas oublié le roman très émouvant de notre collaborateur J.-F. Louis Merlet, et le concours original qui fut organisé à cette occasion, puisque le roman parut sans nom d'auteur.
Les Editions Floréal font paraître dans la quinzaine, dans le format courant des bibliothèques : La Tragique Aventure, et pour cette édition définitive, revue et corrigée, notre éminent collaborateur Victor Margueritte a écrit une préface de laquelle nous extrayons les passages suivants :

Je connais J.-F.-Louis Merlet et l'estime, depuis longtemps, depuis un clair matin où nous nous rencontrâmes sous les pins d'Antibes, à la table de Paul Margueritte, au moment où mon frère et moi, reprenant chacun notre liberté d'action, nous renoncions amicalement, à cette collaboration littéraire qui nous avait du Désastre à la Commune et du Poum à Zelte, en passant par les Deux Vies, si doucement et si étroitement unis.
J'ai retrouvé plus tard Louis Merlet, à Bordeaux, conférencier-chroniqueur aussi à la Dépêche de Toulouse. Depuis il a fait le grand périple, parcouru la vieille Europe qui craque, l'Afrique du Nord, où le croissant de l'Islam luit encore, les Antilles, l'Amérique du Sud. Et toujours, le poète qu'il fut, qu'il est essentiellement, vivait. Le poète qui, avec les Feuilles au vent chanta L'Idole Fragile et la Chanson des Mendiants en strophes aux puissants rythmes, qu'aimèrent Samain et Verhaeren, nobles parrains qui furent avec Pierre Louys, ses premiers préfaciers.
Oui, c'est le poète qui, en Louis Merlet, est demeuré l'animateur, celui qui souffle à ses conférences leur envolée, celui qui donne à ses romans le sentiment de la pitié, en même temps que le sens de l'aventure. Ame orientée vers le large, parce que piétée sur un cœur généreux. Ce don du verbe, qui fait la parole ailée, qui emporte l'écriture dans un mouvement rapide, Louis Merlet l'a toujours, abondamment. Don magnifique et dont on trouvera les fortes traces dans ces pages, où — à côté d'une brève mais savoureuse peinture de l'éducation familiale, telle que la pratiquait avant 1914, la bourgeoisie de Paris et de Province — s'étale, ainsi qu'une truculente fresque, la Russie tzariste, aux jours déjà révolutionnaires qui précédèrent la guerre. Roman de moeurs, avec sa malheureuse héroïne, roman d'histoire avec son évocation d'une époque disparue, roman d'intrigue avec ses épisodes policiers ; la Tragique Aventure évoque ces heures troubles où la dynastie impériale des Romanoff chancelait, à son insu, sur le pope Gapone, en attendant de s'écrouler, avec le moine Raspoutine.
Cette grande leçon, le liyre refermé, on y songe avec une puissante mélancolie. A quelles convulsions la pauvre nature humaine est condamnée, dans son laborieux accouchement de la boiteuse, de la lente, — de l'inévitable justice !
Victor Margueritte



Floréal, 2 décembre 1922.

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