Des origines du cauchemar des scholastes

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On doit au grammairien Gilles Ménage (1613-1692) l'invention de la "dissertation", ce chevalet de torture des lycéens et des scholastes. Il en donna la première mouture en 1652 puis en 1689 sous le titre de Dissertation sur les sonnets pour la belle matineuse qu’édite aujourd’hui judicieusement Guillaume Peureux chez Hermann.
Aussi répandu que la mort du petit cheval, la « Belle Matineuse » est un motif récurrent de la poésie depuis des siècles. L’image de cette femme merveilleuse aperçue à l’aube et déclenchant des vagues d’émotions renversantes, a conduit et conduira encore des poètes à s’épancher sur tous les registres et dans toutes les langues sur la beauté estompant la splendeur du soleil, au bas mot, ou tel autre paysage somptueux.
Enchaînant les arguments comme dans le cadre d’une conservation savante, alternant les points de vue sur la compétence linguistique et poétique et le jugement esthétique, Gilles Ménage établissait un panorama du thème partant du latin Quintus Catulus — qui saluait le comédien Roscius ! — menait jusqu’à Voiture et Malleville qui rivalisèrent de vers sur le sujet… féminin cette fois. En cherchant un peu, on s’aperçoit que le sujet a trouvé des poètes pour l’exploiter jusqu’au siècle dernier. Figure de l’entourage de Madame de Maintenon, Ménage, peint en Vadius dans Les Femmes savantes, auteur du premier dictionnaire étymologique de la langue française, polémiste et érudit, était habité par la conviction qu’au fil des âges l’expression s’affinait et que l’on finirait, à l’aide d’une langue solide et élégante, à faire « beau sens ».



Gilles Ménage Dissertation sur les sonnets pour la Belle Matineuse. Édition de Guillaume Peureux. — Paris, Hermann, 148 pages, 16 €



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