Parce que...

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Parce que...

Parce que de la viande était à point rôtie,
Parce que le journal détaillait un viol,
Parce que sur sa gorge ignoble et mal bâtie
La servante oublia de boutonner son col,

Parce que d'un lit, grand comme une sacristie,
Il voit, sur la pendule, un couple antique et fol,
Ou qu'il n'a pas sommeil, et que, sans modestie,
Sa jambe sous le drap frôle une jambe au vol,

Un niais met sous lui sa femme froide et sèche,
Contre ce bonnet blanc frotte son casque-à-mèche
Et travaille en soufflant inexorablement :

Et de ce qu'une nuit, sans rage et sans tempête,
Ces deux êtres se sont accouplés en dormant,
O Shakespeare et toi, Dante, il peut naître un poëte !

Clément privé



Bohème émérite, Clément Privé (1842-1883) est à l'instar de Félix Arvers l'auteur d'un sonnet, celui que l'on vient de lire. Un sonnet qui prouve que les médecins spécialistes en sont de vrais, spécialistes, puisque son poème figura grâce à Henri Mondor dans la Pléaide Mallarmé. Privé mérite des félicitations.
Sa nécrologie dans l'Annuaire de la presse de Mermet donnait ceci :

Clément privé, de la presse radicale, est mort à la maison de santé Dubois. Ancien élève de l'Ecole centrale, M. Privé avait d'abord été employé comme conducteur des ponts et chassés, avait ensuite, avant de venir à Paris, rédigé divers journaux en province († 17 mai).


Il était en réalité agent voyager avant de devenir journaliste et l'ami de Léon Cladel, Jules Vallès, etc. Il était le Jacques Lehardy du Chat noir de Goudeau.

(Nous empruntons son portrait à Tybalt).

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