Une mise au point par Jean Castelli (à propos d'un blabla sur J.-J. Pauvert)

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Proche collaborateur de l'éditeur Jean-Jacques Pauvert, Jean Castelli a lu avec abattement un livre qui vient de paraître en se faisant passer pour une monographie de Jean-Jacques Pauvert.
Las, son auteur n'est pas à la hauteur malgré les apparentes spécialités de sa profession - qui lui interdisent apparemment ce que l'on nomme le "travail" et les "vérifications". Il est vrai que la recherche et la vérification sont un sport nécessitant endurance et obstination. Et à ne jamais pratiquer on finit par ne plus savoir faire.
Il a semblé à Jean Castelli que l'histoire éditoriale du siècle dernier méritait mieux qu'un hâtif bouche-trou torché à la 6-4-2 bourré de phrases, de bêtises, de boulettes et, généralement, d'épaisse balourdise.
Bref, il semble assez incroyable qu'un tel livre puisse paraître. Des oublis et des erreurs sont toujours possibles mais on en est là au point où l'on se demande comment un éditeur, Calmman-Lévy, a pu se compromettre dans une aventure aussi ridicule.
On ne dit pas bravo. On attend un travail sérieux qui va bien finir par paraître.

La lettre circulaire de Jean Castelli

Principal collaborateur de Jean-Jacques Pauvert jusqu’au rachat des éditions par Hachette en 1973, soit pendant dix sept ans, je n’ai pu lire sans tristesse le livre d’Emmanuel Pierrat publié chez Calmann-Lévy. J’ai découvert en effet à quel point la personne de Jean-Jacques Pauvert et toute son aventure professionnelle s’y retrouvent cruellement dénaturées, l’auteur manifestant une absence totale d’affinité intellectuelle avec son personnage. Je considère de ce fait qu’il est de mon devoir de porter à votre connaissance les nombreuses erreurs et approximations contenues dans ce livre.
Outre que l’auteur manifeste de surprenantes défaillances de culture générale (1), j’ai relevé un nombre considérable d’erreurs factuelles, pas moins d’une vingtaine (2) pour les plus graves, beaucoup plus si l’on doit compter les interprétations erronées, les légendes et les fausses informations répandues dans la presse et reprises sans aucune vérification. Qu’il s’agisse de la publication du dictionnaire Littré, de la diffusion des œuvres du marquis de Sade, du chiffre de ventes d’Histoire d’O, du nombre de procès encourus pour ces livres (l’auteur parle d’une vingtaine de procès, il n’y a eu en fait que deux procès Sade et pas de procès pour Histoire d’O, mais des poursuites et des interdictions, comme beaucoup d’autres livres publiés par Pauvert). Qu’il s’agisse encore d’Albertine Sarrazin, de Papillon, de la publication des œuvres de Boris Vian, événements éditoriaux dont j’ai été le premier témoin, rien de ce qui est écrit dans ce livre n’est exact.
Quant aux lacunes, elles sont si nombreuses qu’elles découragent l’énumération. À retenir cependant, la quasi absence d’André Breton dont l’influence sur Pauvert a été pourtant profonde, de même que l’aventure de la revue Bizarre, celle de la collection « Libertés », soit, tout ce qui a fait l’originalité du catalogue Pauvert et l’a inscrit dans la durée. L’une des plus graves étant l’absence totale dans ces pages de Christiane Pauvert, décédée en 2008, épouse et collaboratrice de JJ Pauvert dès le début de son aventure éditoriale. Je tiens à témoigner non seulement de l’importance de son rôle sur le plan littéraire, mais aussi des liens profonds qui unissaient l’éditeur à sa femme, et de la vie de famille qu’ils ont toujours su maintenir, malgré les aléas, avec leurs deux enfants Corinne et Mathias. Grand éditeur, Pauvert était aussi un homme complexe. En tout état de cause, il méritait un traitement plus sérieux. Il faut espérer qu’il viendra.

Jean Castelli


(1) Notamment p 41, à propos d’Albert Camus.
(2) pp 41, 53, 67, 72, 103, 136, 146, 154, 155, 159, 163, 203, 225, 227, etc.



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