Visages carbonisés, corps absents

HirshFleurdete.jpg



Plus frappant encore que Pluie noire de Masuji Ibuse, superbe et douloureux roman passé sur grand écran par le magistral Imamura en 1989, Hiroshima fleurs d'été est le témoignage de l'écrivain Tamiki Hara (1905-1951) qui se trouvait sur place le 6 août 1945 8.15 AM.
Son livre est composé en trois parties : les jours d'avant, familiaux ("Prélude à la destruction"), le moment même, cataclysmique ("Fleurs d'été"), l'après sans rémission, humainement insoutenable, sans espoir ("Ruines"). Si l'on précise que Hara avait perdu sa femme au cours du mois d'août précédent, c'est-à-dire un an avant la catastrophe, qu'il a été rendu malade par la radioactivité, que ses neveux et proches — ceux qui n'ont pas été pulvérisés instantanément — mouraient les uns après les autres, on comprend assez bien la raison qui lui fit mettre fin à ses jours peu de temps après avoir rédigé ce livre.
Personne n'a jamais été condamné pour la double expérience hors laboratoire sur civils menée par les USA en contravention avec tous les accords et lois internationaux.

Et lorsqu'il montait dans le tramway où se côtoyaient toutes sortes de gens, M. Maki voyait également souvent des passagers lui faire un signe de tête, de part et d'autre. Quand lui-même répondait sans bien réfléchir par un signe de tête, il arrivait qu'on lui dise par exemple : "Mais vous n'êtes pas M. Yamada !", car on l'avait pris pour un autre. Alors qu'il venait de raconter cette anecdote à un interlocuteur, M. Maki comprit qu'il n'était pas le seul à se faire saluer par un inconnu. En effet, il y a fait continuellement à Hiroshima quelqu'un qui recherchait, maintenant encore, une personne."





Tamiki Hara Hiroshima fleurs d’été (1947). Récits traduits par Rose-Marie Makino-Fayolley, Brigitte Allioux et Karine Chesneau. — Arles, "Babel", 131 pages, 6,17 €



Ajouter un commentaire

Le code HTML est affiché comme du texte et les adresses web sont automatiquement transformées.

Haut de page