Lanceur d'alerte

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Parce que sa couverture nous a happé l'oeil, parce que les éditions Wildproject mènent avec un train d'enfer un projet éditorial particulièrement intéressant, et parce que Shozo Tanaka (1841-1913) est une grande figure de l'humanité, il fallait qu'on vous montre ça.
(Quand on vous dit que la vie et merveilleuse : ses limites sans cesse s'écartent pour laisser s'éblouir la femme et l'homme de bonne volonté et de saine curiosité. Et dans un pays qui en est encore à célébrer Cousteau ou à faire crédit à Hulot, l'irruption de Tanaka Shozo a quelque chose de salutaire.)
La biographie établie par le Britannique Kenneth Strong nous présente un homme rare dont la notoriété ne nous était pas encore parvenue. Preuve une fois encore que nos élites ne sont plus guère pertinentes. Et, de fait, plus on est accablé d'experts, moins l'essentiel a des chances d'apparaître. Le cas est clair : L'oeuvre de Tanaka S. est valable pour nous aussi, son exemple doit être propagé. Tout au long de sa vie, Shozo Tanaka a été en but à ses spécialistes de l'argutie et de la statistique huileuse. Il est d'ailleurs passé pour un exalté, un fou, tandis que l'on constate aujourd'hui qu'il inventait un type capital, qu'il incarnait à ses risques et périls : le lanceur d'alerte.
Précurseur majeur de ces représentants de la société des sans-grade/sans-parole, Tanaka Shozo était donc Un boeuf dans la tempête mais il était plus sûrement un petit taureau capable de coups de corne mémorables, comme le lancement d'une pétition destinée à l'empereur (1901). En pleine ère Meiji, le geste n'était pas d'une mince audace.
Amené par ses fonctions politiques et administratives à côtoyer le premier ministre, les industriels et les petits fonctionnaires, il avait entrepris de se battre contre les graves dégradations que les industriels de l'Ashio Copper Mine faisaient subir aux rivières Watarase et Tone (nord-ouest de Tokyo). Les soucis atomiques récents du Japon remettent en évidence ce "cas" particulièrement captivant de l'idée écologique.
élu député à sept reprise, Tanaka Shozo, qui vivait parmi le peuple dans une maison commune, lutta toute sa vie et finit pauvre comme job, nourrit d'une double conviction : la vieillesse n'est pas faite pour cesser de se battre, en particulier pour les fleuves et les rivières qui doivent être protégés. Chenu, il occupa la fin de sa vie à tracer le dessin des cours d'eau japonais.

Quelle serait l'utilité de se retirer dans les montagnes pour y mener une vie de philosophe ? Quel bien cela ferait-il ? Alors qu'un homme peut rester en ce monde, se perfectionner et s'affûter, se transformer en philosophie tout en demeurant au coeur de l'action : voici ma foi du moment, ignorant comme je le suis.

On peine à ramasser tout ce qu'il faudrait savoir de cet homme unique que certains comparent à Gandhi. Tanaka Shozo force l'admiration, et son caractère d'homme d'une ère ancienne, personnage à la fois volontaire, et raide souligne ce qu'une éthique d'autrefois a pu provoquer chez un homme inquiet pour l'Homme à cause de l'Homme.
De l'avis du Préfet maritime, c'est la biographie à lire cet automne.



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Kenneth Strong Un boeuf dans la tempête. Biographie de Tanaka Shozo, écologiste japonais. Traduction de Lucie Blanchard. — Marseille, WildProject, 2016, 318 pages, 20 €

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