Un musée pour les clichés

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Pour la littérature

Inauguration du Musée des Clichés

Dimanche dernier M. Henry Bordeaux, de l'Académie Française, sous-secrétaire d'Etat à la Littérature commerciale a inauguré, boulevard Saint-Germain, le Musée des Clichés et des Lieux Communs mis gratuitement à la disposition des journalistes et des écrivains désireux de réussir dans la littérature, la presse, la politique, le bureau, etc. etc...
M. Henry Bordeaux, précédé d'une suite nombreuse, a été reçu au seuil du musée par M. Louis Forest, notre aimable confrère, directeur du musée, M. Pierre Decourcelle, directeur-adjoint, M. Théodore Botrel, sous-directeur, M. Frédéric Masson, concierge, etc., etc... Le sous-secrétaire d'Etat a visité à bicyclette les salles du musée où de nombreux et précieux documents sont mis à la disposition des étudiants pour se perfectionner dans l'art de ce style neutre, impersonnel et banal qui, seul, permet d'être goûté des foules et d'être distingué de bonne heure par le Gouvernement, les Académies et la grande presse.
M. Louis Forest, préparé par une heureuse et longue carrière de journaliste à ses délicates fonctions de directeur du Musée des Clichés, a successivement présenté au sous-secrétaire d'Etat les plus beaux joyaux de l'importante collection dont il a la garde. On a retrouvé avec un plaisir infini l'aurore aux doigts de rose, l'économiste distingué, le riant bocage, l'innocente bergère, la douce haleine du zéphyr, les coeurs farouches, le radieux visage, le désert affreux, le but sinistre, la grâce enchanteresse, l'amour innocent, les larmes amères, les noirs chagrins, le silence prudent, les sanglots étouffés, le joug odieux, le zèle ardent, etc., etc... utilisés depuis Malherbe par nos écrivains.
Plus de trois mille pièces, soigneusement étiquetées par M. Louis Forest, ont été aussi passées en revue. A li'ssue de sa visite, M. Bordeaux, sous-secrétaire d'état à la Littérature commerciale a rappelé en termes émus toute l'utilité de ces vieux clichés dans la bonne littérature, c'est-à-dire dans celle qui, seule, permet d'être facilement éditée et de s'enrichir rapidement. Il eut des mots charmants pour célébrer son oeuvre propre ; avec une très grande modestie, il l'offrit comme exemple aux éditants enthousiastes.
Parmi les personnes qui assistaient à cette touchante cérémonie (autre cliché) citons MM. Cognacq, de la Samaritaine, Félix Potin de l'épicerie bien connue, Lillaz, du Bazar de l'hôtel-de-Ville, et la plupart des Académiciens.

Duc Onno de Méconnas,
Attaché d'embrassades



Le Merle Blanc, samedi 29 avril 1922.

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