Chopard, comme les autres

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Wilfred Chopard, qui inaugurait à toute berzingue la collection "Galerie du rire" en 1923, n'aura pas eu "La gloire en cinq sec" comme il l'espérait. Son Idole inconnue n'a pas remué les masses, non plus que ses Spicilèges. Son Manuel du parfait arriviste était donc peut-être faisandé. Né le 27 juillet 1895 à Tramelan, en Suisse, il est mort le 25 mai 1958 à Arlesheim. Professeur de lettres, il collaborait aussi à La Semaine littéraire, à la Revue romande, au Journal de Genève et au Monde nouveau.
Voici ce que disait de son Idole les Nouvelles littéraires du 28 avril 1923 :

"Il est dangereux pour un jeune écrivain d'aborder un sujet parfaitement banal : dangereux et décisif, lorsque, par aventure, il s'en titre à son avantage. Le personnage central de L'Idole Inconnue, qui balance tout au long de 250 pages entre deux mariages que lui proposent sa mère, sa vieille amie Céleste, un Anglais collectionneur d'objets nègres - tout un guignol de provinciaux falots - n'a certes pas la prétention d'apporter un type nouveau dans la galerie des héros du roman. Il n'a pas, à coup sûr, le tour d'esprit romanesque qui séduira les jeunes filles ; on pourrait lui valoir la faveur des cinquante mille lectrices de M. Pierre Benoît. Il a pour cela trop lu Laforgue, et sa phrase, élégante toujours, parfois un peu complaisamment arrondie, exprime trop d'indécision, trop de relativisme renouvelé du psalmiste et trop d'indolence agrémentée de sarcasmes d'aimable mémoire. Mais il y a dans la morale de ce personnage qui sait que, suivant le mot de Remy de Gourmont, "la vraie méthode pour dominer la vie est de lui obéir", une noblesse qui n'est pas sans charme pour nous. l'ironie de M. Chopard, à laquelle on reprocherait un peu de monotonie, si l'on ne sentait que cette uniformité même est parfaitement voulue, a une saveur agréable, et, dans la complaisance même de ce coupeur de cheveux en quatre, à son jeu gratuit avec l'infiniment petit, on finit par trouver une sorte de plaisir très aigu et très particulier.
Le livre, écrit au courant de la plume dans une langue très sûre, est un essai curieux d'une écrivain qu'on sent, en dehors et au-dessus des modes courantes, en pleine évolution encore, à la recherche d'un ton d'humour très personnel que souligne un sourire d'une ironie un peu amère.
M. B.


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