Saison d'été (poèmes)

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Saison d'été

Chamonix (Le Mont-Blanc)
Mamelle au nom de gâteau,
qu'un ciel libertin vous suce :
sous les alpinistes-puces
votre lait gèle aussitôt.

Besançon (vieille ville espagnole)
Parce qu'il a des lectures,
le commis d'épicerie
a fleuri d'Estramadure
sa fenêtre à jalousies.

Normandie (chaumières)
Bien que les oiseaux s'en aillent,
l'été va durer toujours :
Ermenonville et Cabourg
gardent leurs chapeaux de paille.

Naples (... et Mourir)
Oh ! je sais pourquoi la petite poitrinaire
du quatrième s'est éteinte ce matin :
elle avait, à ce qu'il parait, la nuit dernière,
frôlé du songe le pays Napolitain.

Toulon (Matelots)__
Un boulet du cuirassé,
en manquant l'aérostat,
jonche le quai de Cronstadt
des éclats du ciel cassé.

Venise (Barcarolle)
Si l'eau qui dort pouvait parler,
elle raconterait l'histoire
de l'agent, place des Victoires,
qui rêve d'être gondolier.

Marine
Un bateau, sur l'eau, qui part ;
une église, en haut, qui veille ;
dans la rue aux lupanars.
un marin triste (Marseille).

Sirènes
Ariane, petite sœur, ne mourez pas :
il peut venir, encore, et j'aurais trop de peine ;
déjà, ressuscitant le temps qu'il vous quitta,
les steamers sur la mer font chanter leurs sirènes.

Feuilles
Amour éternel (Mars, Avril
- sortent nu-tête les verdures -
Septembre, Octobre...) puisse-t-il
durer ce que les feuilles durent.

Jacques Bonjean



Les Nouvelles littéraires, samedi 30 août 1924.



Illustration du billet : ill. de Constant le Breton pour Consolata, d'Henry Daguerches, 1928.

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