Conscience et violence

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Alors que le prix Apollinaire vient de procéder à un choix déjà contesté, paraît un livre de poésie remarquable aux éditions La Clé à molette. Il est signé Guillaume Michaut, citoyen dont on se demande s'il a un rapport avec le poète Machaut ou avec le bibliographe Michaud. Peut-être ni l'un ni l'autre, et ça n'est d'ailleurs pas la question.
Si elle arrive à l'esprit cette interrogation étrange, c'est que les vers de Guillaume Michaut ont une expression si ferme qu'elle leur donne la force de l'évidence : Michaut n'écrit pas comme on respire, il écrit comme on en bave. D'où, sans doute, ce crâne posé sur la très belle couverture de la graphiste Juliette Léveillé.
On a lu les soixante pages du petit volume d'une traite, et l'on a recommencé ensuite. Et... on a décidé de poser ce Michaut-ci sur une pile des livres auxquels on aime revenir pour ne pas y passer la journée.

je ne suis pas le chien de l'explicite
des oiseaux-fleuves me créent et me hurlent
brigande mes paroles maraudes mes écrits
et tu m'auras compris

brasserie des hasards murmurés
un seul long poème déligaturé
des corridors qui s'étirent
les structures ont la chtouille peureuse.




c'est à la fois sa beauté et son tribut
je parle de la folie qui parle des invisibles
qui parlent dans mon stylo qui parle du tout-autre
c'est l'endettée définitive
c'est la saumone a contrario

c'est celle qu'on incarcère pour grivèlerie


Sa prosodie marche au rythme de son pied propre, mais on ne peut s'empêcher de lui trouver un air de famille lointaine avec Yves Martin ou Christian Bachelin. Une solitude métaphysique. Il a aussi un allant qui va l'amble des vers de Dominique Poncet, lorsqu'il ne suit pas le cours d'une mélancolie, comme celle qui exsude de certains vers de Valérie Rouzeau, Il y a beaucoup de choses dans les pages de Guillaume Machaut mais il a sa patte, c'est indéniable, et on devine qu'il l'a formée en l'usant.

Un détour vivement conseillé aux lectrices et lecteurs curieux.



Guillaume Michaut Conscience et violence. - Montbéliard, La Clé à molette, 68 pages, 12 €



Chez le même éditeur, il se pourrait qu'on apprécie aussi le Journal pauvre de Frédérique Germanaud, récit d'une rupture avec le salariat. Frédérique Germanaud Journal pauvre. - M., La Clé à molette, 160 pages, 13.50 €

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