Mektoub

DictioAlgJaySalim.jpg


C’était écrit : il suffisait de lire. Et c'est ce qu'a fait Salim Jay pour composer un vaillant Dictionnaire des romanciers algériens qui dépasse tout ce qui s'est fait jusqu'à présent en la matière.
Pour aboutir à ce résultat remarquable, et en nombre de références et en pertinence, Salim Jay a lu au cours des cinquante ans dernières années tous les romancières et romanciers algériens dont lui parvenaient les oeuvres. Analysant les textes, il y a perçu l'évolution des mentalités, de la société algérienne et française, la mobilisation d'un peuple, la modification des préoccupations.
Mieux qu'un essai, les fiches ont l'avantage de nous raconter l'histoire et l'art littéraire algériens par morceaux cohérents, non dilués dans le collectif où, trop souvent, ne surnagent que quelques têtes de pont, pour ainsi dire. Un exemple parlera vite : cueillant toutes les proses, y compris les nouvelles éparses et les récits (non-fiction) à vocation littéraire, Salim Jay nous présente l'universitaire Djamila Khammar qui détonne avec son unique nouvelle "Le samedi noir de Bab el Oued" publiée dans un collectif de l'Institut du Monde arabe. Naturellement, on va courir la lire, si on la trouve.
Bien entendu, on redécouvre ici Medhi Charef, dont personne n'a oublié Le Thé au harem d'Archi Ahmed (Mercure de France, 1983) qui, longtemps après Albert Camus parlait de l'Algérie dans les ghettos de Nanterre d'une manière étonnamment forte et pudique. A ses côtés, sociologues un temps raconteurs, universitaires touchés par la grâce de l'art, artistes, Algériens d’ici, Français de là (1). Voyez encore Mouloud Achour, Waciny Laredj, Kamel Daoud, Mohammed Dib, Samira Sedira, Hélène Cixous, Fadhma Amrouche, Fatima Bakhaï, Mohamed Balhi, Myriam Ben, Karima Berger, Nacer Kettane, Yamina Mechakra, Bachir Mefti, Benamar Médiène, Rachd Mokhtari, Ahlam Mosteghanemi, le prolifique Tahar Ouettar, ou Aïssa Touati, ex-ouvrier de fonderie et ami de Pierre Guyotat, dont La Temesguida racontait une enfance dans la guerre d’Algérie (2013), et ce jusqu’à Ahmed Zitouni (Attila Fakir, Souffles, 1987) mais aussi Fatma Zohra Zamoum dont le titre avait attiré l'attention sur le récit au moment de sa parution : Comment j’ai fumé tous mes livres (La Chambre d’écho, 2006).
Mektoub.
Ne reste plus qu'à rattraper nos retards de lecture...

Salim Jay Dictionnaire des romanciers algériens. - Paris, Serge Safran éditeur, 480 pages, 27,90 €

(1) On est loin de la Mémoire écrite de l’Algérie depuis 1950 (Maisonneuve & Larose, 1992) de Jeanine de la Hogue et Simone Nerbonne qui effaçait systématiquement les auteurs algériens ou de langue arabe au profit des Pieds-noirs ou des Hexagonaux.)

Ajouter un commentaire

Le code HTML est affiché comme du texte et les adresses web sont automatiquement transformées.

Ajouter un rétrolien

URL de rétrolien : http://www.alamblog.com/index.php?trackback/3835

Haut de page