Alfred et le Contadour

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Comment qualifier la coïncidence ? Alors qu’on lit Georges Navel de fond en comble, pour toutes sortes de raison, voilà que reparaît le magnifique Pain aux étoiles d’Alfred Campozet. Livre enthousiaste et frais d’un compagnon de Giono au Contadour qui tient du témoignage, du récit fleuri et parfois même du poème en prose parfois.
Pour les gens sérieux et pressés : c’est aussi un parfait document d’histoire littéraire. Quoi qu’il en soit, on a toujours tort de n’avoir pas lu Alfred Compazet, maçon et écrivain, personnage dont l’écrit restesra à coup sûr comme l’un des grands témoignages d’une époque, d’un moment, d’une volonté collective.

Il est des chemins qu’on savoure, certains feutrés d’herbe, embaumés de menthe, d’autres souples au pas et d’une élasticité telle qu’on se sent pas elle propulsé sans effort. D’autres ne sont que mince piste, si mince qu’on hésite parfois, se demandant s’il s’agit bien d’un sentier d’hommes ou d’une passe de sauvagine. Il en est d’allègres dont les cailloux chantent sous la semelle, d’autres parcourus d’eaux folles. Mais monter de Banon au Contadour, c’était trois heures de marche sur un chemin sans attraits. Un gravier de marche sur un chemin sans attraits. Un gravier rêche, tout autour un taillis maigre de chênes bas sur un sol de caillasse. pas une ferme ni rien, cris de volaille, odeurs de foin, rien de ce qui les signale de loin, même quand elles se cachent dans la végétation , et fait au marcheur solitaire un petit signe d’amitié. A mi-route, on trouvait quelques champs de lavande et, sur un éperon isolé, les ruines d’un village depuis longtemps retourné à la pierre. Sans même l’éclat d’un fragment de vigtre ou le sourire d’une tuile, sans même le bouillonnement de verdure qui ailleurs envahit le creux des maisons mortes, il n’était plus que chicots de murs, moelleons descellés et prêts à rouler par l’éboulis vers le lit sec de l’ancien torrent. Cette mort totale faisait apparaître plus insolite encore une école coiffée de toutes ses tuiles, aux volets repeintss de frais, plantée là toute seule et nue, sans un arbre, entre la route et les lavandes (...).


Il serait bien dommage de se priver de ce baume, et de ces histoires d’êtres humains affrontant les cailloux et les murs.



Alfred Campozet Le Pain aux étoiles. Giono au Contadour. Edition augmentée, présentée par SYlvie Durbet-Giono, éditée par Emmanuel Bluteau. — Le Raincy, La Thébaïde, 2020,



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