Bernheim Jeune Jeune.

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Le Chinois avait mis sa queue à l'envers. Fallait-il la lui couper ? L'entrée du dancing était de 0 fr. 50. Il était un peu ridicule cet éphèbe avec ses deux pouces dirigés vers le ciel. Fils du ciel, dit-on, est-ce pour les pouces ? Geste extatique, bouddhique et ridicule sur un air hawaïen ou sur Butterfly. On laissait là toutes ces japoniaiseries... Pensez, le baccara ouvrait ses portes aux pontes, aux banquiers, à tous ceux qui voulant décupler leur vingt sous perdaient leurs chemises, leurs bretelles et leurs bas.


Jacques Darnetal Patrice. Préface de Maurice Rostand. - Editions du Monde nouveau, 1923.

Jacques Darnetal, qui avait de l'entregent, fut très tôt illustré par Daragnès, préfacé par Maurice Rostand et par Paul Reboux, chroniqué par Léautaud. Il connut assez tôt aussi les honneurs de son portrait en tête de Paris-Soir, agrémenté de cet éloge.



Jacques Darnetal.
Des informations contradictoires nous ont annoncé, il y a peu de temps, que M. Jacques Darnetal s'appelait Jacques Bernheim, puis que M. Jacques Darnetal continuerait à s'appeler Jacques Darnetal.
En réalité, ses parents lui- ont donné un nom, et lui-même tente de s'en faire un autre par ses écrits.
Jacques Darnetal fut élevé parmi les chefs-d'œuvre puisqu'il est le fils de M. Bernheim, dont le nom - s'associe à l'idée de toutes des ventes importantes de tableaux, depuis ces derniers temps. C'est pourquoi il était particulièrement qualifié pour parler, comme il le fait, de la peinture, du rôle des marchands de tableaux, de la hausse des oeuvres peintes par certains artistes, des collectionneurs, et du snobisme contemporain.
Mais c'est surtout comme homme de lettres «qu'il souhaite d'atteindre la renommée.
Ce siècle n'avait pas un an quand Jacques Darnetal est né à Paris. Il avait quatorze ans lors de la déclaration de la guerre et connut l'existence passionnante de ceux qui rêvaient de partir, et d'être pour - quelque chose dans les communiqués.
Pourtant, une fois soldat, il passa trois mois en prison pour ne pas s'être trouvé tout à fait du même avis que ses chefs, sur certaines questions de discipline.
Depuis, il publia deux romans : Le Faune Humain, et Patrice, préfacé par Maurice Rostand. Cette œuvre atteignit quinze éditions, ce qui est bien honnête pour un début. Elle offre un mélange de pathétique et de dandysme où beaucoup de jeunes Hommes — selon l'expression d'Henri Duvernois ; reconnurent leurs inquiétudes.
Après un volume de vers : Dissonances, Jacques Darnetal publia, l'an dernier, L'Energumène, qui en est à sa douzième édition, et qui atteste — a écrit Pierre Mac Orlan — un véritable tempérament d'écrivain. « Les idées — dit Henri Bidou — y bouillonnent' et le sang coule sous ces phrases. » Ernest Charles en jugea le style '« amusant et pittoresque ». Et Maurice Boissard qui, pourtant, ne pèche pas par 'excès d'indulgence, s'écria : « C'est merveilleux d'écrire comme cela ! »
Dans peu de jours, Jacques Darnetal va publier, sous le titre : Le Promenoir des Anges, un volume d'essais où il nous dira ses idées sur la vie, l'amour, les femmes, le ridicule, les Anglais, les acteurs. Et il prépare, pour l'an prochain, un roman important : L'Extinction des Feux, développement d'une thèse féministe à laquelle il apportera la chaleur de son âme jeune et le prestige de son talent chaque jour un peu plus mûri.
Voilà un bagage littéraire qui, en raison de l'âge de l'auteur, ne laisse pas d'être considérable. Il sied de louer M. Jacques Darnetal, pour qui la vie s'offrait facile, de n'avoir pas voulu être du nombre des jeunes gens qui jouissent paisiblement — ou bruyamment — de la fortune paternelle.
Paul Reboux



Paris-Soir, 4 avril 1925

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