La mort d'Emma Lambotte

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Emma Lambotte vient de mourir à Anvers, dans sa quatre-vingt-septième année. On n'oubliera pas cette femme qui prataique avec une égale ferveur une sagesse souriante et la vertu de l'amitié.
Née à Liège,elle vécut à Anvers, sensible à la fois aux paysages de la Meuse et à la gravité de l'Escaut. Abondante et variée, son oeuvre est faite de prose et de poésie, passant du chant intérieur aux récits imaginaires ou à l'essai. Traductrice, elle a publié des versions françaises de poèmes wallons et iroquois.
Dès sa première oeuvre, Les Roseaux de Midas, qui parut en 1910, son talent fut reconnu. Ce recueil fut préparé par Laurent Tailhade et Guillaume Apollinaire en souligna les qualités. Son esprit, sa tendresse, sa douce ironie qui n'excluait pas la générosité devaient plaire à l'auteur d'Alcools. Cette açon aussi qu'elle avait de considérer et de juger des hommes et des choses : "La pluart des femmes, écrivait-elle, ont l'air bête, mais presque tous les hommes le sont..."
Le monde de l'enfance lui était particulièrement cher, ce dont témoignent son recueil de Mots d'enfants aussi bien que son roman : May et le monstre du Loch-Ness, que couronna l'Académie française.
On relira encore les beaux poèmes de Paniska et d'Heureux Vallon ; on reviendra à Prestige d'Anvers et aux pages émouvantes qu'Emma Lambotte consacra à la reine Astrid.
Discrète, elle eut la grâce de ne jamais s'imposer, aimant néanmoins à participer aux réunions d'écrivains où elle retrouvait tant d'amis. C'était à Bruxelles, à la maison Camille Lemonnier, à Arlon, pour la Semaine du livre et la Bénédiction de la forêt ; Liège ne fut jamais oubliée dans la fidélité à cette Wallonie dont elle connaissait le coeur et l'âme :
J'ai tant besoin de l'atmosphère wallonne,
Des visages rieurs,
Du doux,
Du chantant parler de chez nous !
J'ai tant besoin pour être bonne
D'autres accents trop durs ont blessé mes oreilles...
Aussi, je le sens bien, pour mes dernières veilles,
Tu me rendras, Seigneur,
La terre des aïeux.
Cette satisfaction en lui a pas été donnée, mais elle put toujours se réfugier dans la douceur du souvenir, recevant les joies et traversant les épreuves avec une pareille sérénité.
A. J.



Le Soir (Bruxelles), 22 mars 1963.


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