Il est un large bandeau rouge sur un volume replet. Ce bandeau rouge dit "Inédit" et on n'a aucune peine à le croire en lisant le haut de la couverture : on aurait réuni là la poésie complète de Nietzsche... D'abord un peu incrédule, mais confiant, on lance tout de même un "Mazette" et puis on ouvre ce bibendum que nous propose le traducteur Guillaume Métayer.
Depuis des mois, on s'y trouve particulièrement bien, picorant ci, picorant là, ne nous pressant pas de vous rendre compte de l'énorme travail — et ça n'est pas bien, mais vous savez bien que nous sommes plus jouisseurs que surhommes sur notre île. Pour nous faire pardonner ce retard qui pourrait passer (à tort) pour de la négligence, nous vous donnerons ci et là toujours quelques vers de l'étonnant personnage que Guillaume est allé chercher partout, y compris dans sa correspondance. Commençons par ces quelques vers de 1882...
Pin et Eclair
Au-dessus d'homme et bête j'ai poussé
Et parle — mais nul pour me parler.
** Je me suis dressé trop seul et trop grand :
J'attends : que puis-je attendre pourtant ?
** Trop près de moi les nues ont leur repaire :
J'attends le premier éclair
On nous assure que c'est une "première mondiale" que ce panorama, et on n' aucune peine à le croire puisque les oeuvres poétiques de Nietzsche ont toujours été traitée à peu près par dessus la jambe, si l'on excepte quelques pièces singuliers comme les "Dithyrambe à Dyonisos". Et c'est ainsi que les Belles-Lettres sont grandes : elles nous fournissent un panorama exhaustif, en version bilingue pour les germanophones, d'une oeuvre qui ne pouvait maltraitée. Les lecteurs apprécieront de constater à quel point l'oeuvre du philosophe symboliste était attentive aux paysages et peuplée d'oiseaux, plis romantiques pris.
A suivre.
Friedrich Nietzsche Poèmes complets. Edité, traduit et présenté par Guillaume Métayer. — Paris, Les Belles-Lettres, 2019, pages, 45 €