Du nouveau sur le Bla bla bla

De source lyonnaise, cette information nouvelle sur le bla bla et le bla bla bla. Nous avions, c'est clair, oublié de consulter le livre de référence d'Alice Becker-Ho, Les Princes du jargon :

Quand l’onomatopée se répète deux, voire trois fois, c’est elle qui occupe tout le mot, le saturant de ses stigmatisations : un broubrou, en vieux lyonnais,est quelqu’un qui mélange tout, « qui dérange tout pour n’aboutir à rien »(19) ; le Dictionnaire de l’Académie cite encore la vieille expression bredi-breda (sans articuler, à toute allure) : « Il nous a raconté cela bredi-breda. »(20) Tel est le cas moderne de blabla, voire blablabla,onomatopées pures des années quarante,« paroles creuses destinées à masquer le vide et à faire impression sur l’auditeur » (Robert historique). Origine : invention de Céline, affirme Albert Paraz. Mais Alice Becker-Ho nous apprend qu’on trouve blah-blah dans l’argot américain au sens de « propos creux, paroles pour ne rien dire » (à partir de blah,qui signifierait sornette, fadaise et, plus lointainement, du nom a blah qui désigne, en anglais populaire, « an indiscreet talker », baratineur assommant(21)). Avec la réduplication, le discours est signalé comme tellement inintéressant qu’on n’en constate que le bruit, qu’on le rejette comme étranger et qu’on pourrait supposer en son arrière une volonté d’entourloupe.



Extrait de Maurice Tournier "De Barbare à Babel, des sons qui bredouillent et excluent", Mots, les langages du politique (n° 78, juillet 2005)

Notes
19 Nizier de Puitspelu, Le Littré de la Grand-Côte (Lyon, À l’image de la cigogne, 1903).
20 Dictionnaire de l’Académie française, t.1, 1884, p. 218. À rapprocher de bret, cri mal (...).
21 A. Becker-Ho, Les Princes du jargon, Paris, Gallimard, 1993, p. 40.

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