Pointes et piques de 1975

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En juin 1975 paraissait le "Dictionnaire imaginaire de quelques poètes réels", de Raymond Marquès, dans la Tour de Feu de Pierre Boujut, dont il constituait la 126e livraison. Farfelu en diable, on y trouvait des notices plus ou moins tordues qui ne manquent toujours pas d'air, non plus que de mordant. Comme en témoigne, in cauda venenum, le final du numéro :

« (...) Nous avons commencé par statufier les pires. Que les meilleurs se consolent ! Nous ne les oublierons pas ! »

A titre d'exemple, nous donnions en septembre 2009 celle qui consacrait Henri Simon Faure bouillant parmi les bouillants. Marquès s'y montrait essentiellement déférent :

« Enfant de l’assistance a écumé très jeune son Clermont. Chef de bande redoutable connu sous le nom de Sigismond le Fol. Sauvé par de Gaulle à la bataille de Montcornet, fait dix ans à Cayenne cinq à Clairvaux et sept à la Santé. Depuis toujours en cavale. Eructe des poèmes et sent de la hure. Famille très nombreuse qui remonterait jusqu’au XIIe siècle. Ne sait plus lui-même. Correspondant de journaux de mode féminine, pose pour manger dans des académies de nu (tarif sur demande). »

Donnant la liste des autres "poètes réels" arrangés, nous furent réclamées les notices consacrées à René Char, à qui va convient assez bien la péroraison, à Michaux, à Bonnefoy, et à tutti pasti. Les voici enfin...



Saint-Pol Roux : « A perdu sa craquette avec un boucher allemande qui se cachait sous l'uniforme. Très bieux manoir, s'est dissipé dans le brouillard. A laissé son nom à une espèce d'étourneau breton et à une fille inconsolable (le boucher a été fusillé). »

Aragon : « Parce qu'il était fils d'une lingère et d'un préfet de police s'est pris pour le Péguy de son époque. Froufrouteur de Nancy Cunard qu'il fourgua à la morgue, s'afficha avec Elsa, petite vendeuse de la Butte, dont il chanta les charmes dépucelés. Trempa sa plume dans le nombril de Staline et endossa la veste d'un résistant de salon pour honorer Benjamin Peret. Blanchi sous le veuvage, fait le fête à la Courneuve où il saute sur les genoux de Madame Edmonde Charles-Roux qui le confond avec Gaston Defferre »

René Char : « De son vrai nom Fouquier-Thinville a décapité Félix Faure d'un coup de serpe sur le gland. Ppète secret, n'aurait vraisembablement rien écrit de son vivant. Admirateur de Camus qu'il prenait pour une sorte de merguez. »

Henri Michaux : « A pris les fourmis pour des poétesses et les Indiens pour des ronds de citron. Mais quel artiste ! A remporté le Tour de France en catastrophe après avoir comblé deux précipices. A coincé, comme il convenait, Pierrette Micheloud sur le talus. Censuré. »

Yves Bonnefoy : « Son goût pour les haricots blancs au gigot de mouton lui a fait commettre certaines indélicatesses dont ses déboires à l'Académie Française et au Syndicat des Balayeurs de rues ne sont qu'une pâle conséquence. A la manie de piétiner les plates-bandes des squares. Connaît tous les commissariats du Mont Saint Michel. Poète discret et fort bien habillé pour son âge. »

Paul Valéry : « Percepteur de campagne a fini les bras en croix, en vieux granit, à l'entrée du cimetière de Sète. Photographié à cahque saison par le même touriste américain qui le confond avec Brassens. A laissé une oeuvre célèbre tombée dans le domaine public : La Salade mythologique d'un style très universitaire. Réimprimé par Filhol en cachette de sa femme. »

Georges Fourest : « Transforma Alice Cluchier en négresse blonde pour la sirprise lyrique et le bonheur délicat d'Aimé Césaire qui se mit à rouler des r comme Démosthènes des cailloux. Une révolution à la biguine naquit de ce poème oral ; la France, comme d'hbaitude, paya les frais de banane. »

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