Guy Darol met le feu à ses poudres

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Après son excellent panoramique des rockers oubliés, Guy Darol, l'impénitent zappatiste (1), participe à la renaissance des éditions Maurice Nadeau après la disparition de leur fondateur.
C'est avec un roman, que l'on dira de formation et de dérive poétiques, qu'il relate ce qui fut son expérience de jeune poète dans les années 1970, cette décennie où « Chacun y allait de sa démolition, à coups de vocables cognés, comme des bolides qui se heurtent dans un couloir de rue et les carrosseries se volatilisent dans des jets de pierres, de vitres, de plaques de tôle, clous, écrous, vis. On mettait le feu aux poudres. »
De fait, le verbe fusait, tiré vers le haut, riche en couleurs et en matières, parfois révolutionnairement amphigourique pour provoquer la réaction. L'expérimentation primait, comme l'extase et l'ivresse de la formule, et le narrateur, faux Guy Darol sans doute bien proche du vrai, convoque ses étoiles — noires, s'entend — qui l'accompagnait, c'est-à-dire Duprey, Artaud, Guyotat et quelques beatniks du temps jamais désavoués, toujours transis.
Il les croise parfois du reste, leur parle, dans une sorte de délire de la ville habitée, ou plutôt envahie, tandis qu'il déambule sans fin, puisque c'est cela le combat du poète sans poudre : il lui faut trouver sa voie tandis qu'on porte les mots comme des bombes, où l'on imagine que les slogans sont clastiques, blast ! Tandis que les poètes incendient le réel après 1968.
Au temps des Laude et autres Pélieu, Guy Darol a manifestement laissé un bout de son âme qui lui offre en retour de pouvoir si bien retrouver l'enthousiasme et l'allant, la folie même de ce temps où jeunesse était vaillance, où la poésie exigeait que ses sectateurs en passent par la gésine. Douleurs et emballements, beautés inspirées puis perdues, une ère, que dis-je, une épopée dans l'époque.

Pour évoquer cette époque poétique pleine de merveilles parfois un peu oubliées, où certains tentaient des "manifestes" pour faire comme leurs glorieux aînés avec une emphase qui était loin de valoir toujours talent, l'Alamblog donnera prochainement un entretien avec Guy Darol sur ces années cosmiques.



Guy Darol Guerrier sans poudre. — Paris, Maurice Nadeau, 240 pages, 15 €



(1) Voir le catalogue du Castor Astral.
Et pour les collectionneurs, ce projet initial de la couverture :
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