L'Heure finale d'Adrien Le Corbeau

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L'heure finale
A tous ceux qui sont morts, à tous ceux qui mourront, à tous, M. Adrien Le Corbeau dédie son livre : L'Heure Finale.
Commen on s'en doute, rien qu'à la lecture du titre et de la dédicace, il s'agit du récit de la dernière heure d'un homme. On ne peut reproche à M. Le Corbeau d'être un auteur banal et frivole : une serein gravité marque ses traits, et cet auteur, dont l'Académie a couronné le front, nous a déjà l'histoire d'un arbre qui grimpait jusqu'aux cieux et que, modestement, il baptisa "Le Gigantesque".
Du temps où régnait la valse boston, on eût pu croire que L'Heure Finale servait désigner quelque musique de danse à trois temps. Hélas ! les tissages ont perdu leurs beaux habits rouges et leurs frères cadets se teignent le visage en noir. Le temps des valses est finit et M. Adrien Le Corbeau songe à la mort.
M. Adrien Le Corbeau est un disciple de Pascal, mais un disciple qui tâche d'être serine. A la vérité, M. Le Corbeau ne veut point mettre dans l'âme de ses lecteurs cette angoisse que symbolise pour nous l''auteur des Pensées.
L'Heure Finales est l'heure qui se calme, et sans insister sur les détails physiologiques, notre auteur étudie la ruine de l'homme, la dispersion de sa conscience. M. Le Corbeau n'est pas de ces écrivains maigres, inquiets, tourmentés. "J en sens pas l'horreur de la mort", dit-il avec un bon sourire vivant ; et il raisonne : "La mort est banale, parce que coutumière ; la mort n'existe pas; elle marque simplement la rencontre de deux phases : une qui finit, l'autre qui commence."
M. Le Corbeau, qui, tout de même, répond assez peu, physiquement, à l'idée qu'on se fait d'un admirateur ou d'un disciple de Pascal, s'en va, calme, auguste, serein, couronné par l'Académie française. Je pense encore au titre des valses sentimentales, mais bien portantes. Allons, monsieur Le Corbeau, l'Heure Finale, c'est l'heure exquise.


Nouvelles littéraires, 15 mars 1924.


Sur le même sujet, d'un point de vue nettement différent, il n'est pas mauvais de se pencher sur le très beau livre d'Alexandre Bonnier, La Mort quotidienne (Marseille, Chemin de ronde, 1985).


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