Langue et enseignants, le rapport du média universel et du corps de première nécessité ne connaîtra jamais l'interruption. Depuis qu'en classe, qu'en salle, que face à des apprenants, des adultes professant professent, s'accumulent les instantanés, les snapshots, les paragraphes aussi bien dérobés que les clichés saisis par la presse au vol. En classe, par-devers soi, tandis qu'on est immergé au coeur des sujets apprenants, il semble difficile de ne pas laisser traîner son cerveau. Alors on zolatte et on mallarmanne, en voici encore deux exemples :
Hélène Sevestre, qui fut la "poète de dix-ans" célébré dans les années 1970 pour ses Poèmes sauvages (Nadeau), devenu académique de métier donne un livre plein de bâtons rompus et de kalachnikov. La guerre est là-bas et ceux qui la fuient dans ses pages.
Malgré le peuple de cercles que forment les pales du moulin quand le vent tombe, la kalachnikov sur les reins, j'entre. Tu devras utiliser ton arme, ancien Quichotte installé dans la pénombre dense, nettoyant son barillet pour voler, pour secourir.
Là, avec Babeluttes, intitulé avec astuce comme ces caramels qui collent aux dents, Aurélia Bécuwe la baroudeuse dit, elle, autre chose du quotidien des professeurs :
J’évoque le pouvoir thérapeutique de l’écriture : vider ce qu’on a dans le ventre, mettre en mots soulage, un peu. Ils me racontent le suicide, le viol, leurs peurs, les intrusions nocturnes alcoolisées paternelles, les parloirs, la séparation, la mort, l’inceste.
Dégoupillage de la langue, découpages des syntaxes, des syntagmes, aperçus transverses, propos hors-barrières. La langue justifie tout.
C'est à quelle heure la sortie ?
16 h 45, Madame.
Ça fait quelle heure, ça ?
Hélène Sevestre La Professeure de langue. - Héros-Limite, "Tuta blu", 135 pages, 16 €
Aurélia Bécuwe Babellutes. - Mhère, Conspiration éditions, 134 pages, 16 €