George Auriol (1926)

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George Auriol
Vous est-il jamais arrivé de regarder un répertoire publié par un fondeur de caractères d'imprimeries ?
Déjà Théophile Gautier et José-Maria de Heredia jugeaient. que les plus beaux livres étaient, la plupart du temps, les catalogues de collections, les dictionnaires analogiques et les manuels professionnels.
Si vous ouvriez le gros volume où une maison, telle que, par exemple, la Maison Peignot, a groupé des exemples de caractères modernes ou classiques, des vignettes et des filets, il faudrait que vous eussiez le cœur bien insensible pour qu'il ne s'émût point.
Quelle, admirable œuvre décorative que ce beau livre ! Combien il exprime, par des arabesques savamment étudiées, non seulement l'intelligence de décorateurs excellents, mais encore, sous la forme la plus restreinte, un résume de l'âme humaine !
Il est juste que ce même mot : caractère désigne les signes d'imprirtierie et les dispositions de l'esprit humain.
Il y aurait toute une étude psychologique à faire sur le modernisme des Roburs, agressifs et impérieux comme les capitalistes d'aujourd'hui, l'aspect si savoureusement suranné des Egyptiennes grasses et des Aldines, l'élégante noblesse des Firmin Didot et des Romain gras Vibert, les plaisantes oppositions entre les pleins et les déliés des Normandes, l'harmonie des Elzéviriennes.
Mais où irions-nous si je continuais ?
Ces développements avaient pour objet de m'amener à vous parler de George Auriol, qui fut, avec Grasset, un véritable rénovateur de la typographie moderne, qui inventa six types de caractères plus un nombre de vignettes considérable.
Dans la suite des âges, cette œuvre de George Auriol demeurera. Et l'on continuera d'apprécier l'agrément et le charme de ces créations qui semblent dessinées au pinceau et qui, malgré leur fantaisie, s'ordonnent durant des pages en un rythme dont on ne se lasse point. Il me faudrait parler encore des cinq volumes de contes qu'il composa, de ses études sur l'art, de ses proses et de ses poèmes fantaisistes, de ses ouvrages pour enfants, de l'admirable variété des monogrammes qu'il inventa, de ses dessins pour papiers peints.
Mais comment faire tenir ici l'œuvre d'une existence entière, dévouée avec ferveur à l'art décoratif par un des hommes dont le caractère, la modestie, la fécondité, le talent, méritent d'être donnés en exemple ?
Paul Reboux



Paris-Soir, 23 juin 1926.

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