Diatribe italienne (Céline Minard)

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Avec Olimpia, Céline Minard pousse une nouvelle fois son avantage. Elle est désormais loin devant la cohorte terne des faiseurs de livres d’aujourd’hui. Mettons de côté ceux dont l’objectif n’est pas de proposer du nouveau en littérature, mais de raconter le plus simplement possible des histoires, et examinons les alchimistes et les orpailleurs : qui, parmi eux, évolue aussi admirablement que Céline Minard ?

Nous laissons à d’autres le soin de répondre puisque nous n’avons pas tout lu (et de 1), et que nous ne voyons raisonnablement pas qui pourrait prétendre occulter Céline Minard (et de 2). Rien ne vous empêche de nous proposer quelque nom…

Avec Olimpia, Céline Minard a mis à profit son séjour à Rome (Villa Médicis, où elle a dû faire l’effet d’un dragon dans un magasin de soieries) pour dire toute sa détestation de… Rome. Ou tout au moins son goût pour le verbe fort, poivré, pimenté, contondant, coupant, estourbissant et certaine répulsion du topoï de la belle ville. Il devrait d’ailleurs avoir fait long feu depuis le passage de M. Beyle : pschiitt…

Pour aller au plus court, déclarons que ce nouveau livre est tuant, dans toutes les acceptions du terme, et que l’on se trouve (comme d’habitude) emporté par sa seule volonté. Car il est clair que Céline Minard décide de tout et qu’il ne viendra pas aux lecteurs l’idée de chipoter ci ou çà. Avec Olimpia, comme avec Bastard Battle, on ne discute pas, on admet et on se coule dans le flot, ou on crache le morceau pour aller lire les bouquins conseillés avec émotion par la presse magazine littéraire de littérature. Question de tempérament et de résistance à l’originalité.

Nous n’allons pas nous étaler encore sur la puissance littéraire de Céline Minard. Sur ce point, les aveugles finiront par voir et les sourds par entendre. Nous sommes ici, à l’Alamblog, très confiant sur ce point. Ajoutons tout de même que cette Olimpia n’est autre que la Maidalchini (1592-1657), la fameuse papesse du sacripant Innocent X. Le monologue offert ici est celui de cette femme conduite par l’échec à une folle diatribe, incendiaire, brutale, somptueuse comme une défenestration, une éventration, un écartèlement. La haine y brûle tout, c’est très beau.

Ceux qui ont déjà lu les proses de Céline Minard savent à quoi ils peuvent s’attendre.

On comprend leur impatience *.



Céline Minard Olimpia. - Paris, Denoël, 91 pages, 10 euros


  • Mis en vente le 5 janvier, le livre est… en cours de réimpression.

Post-scriptum pour les rieurs
On a lu quelque part que Céline Minard n’avait pas raté son “travail de dynamitage de la langue” cette fois-ci. Oui, amis nautes, il est consternant de lire une chose pareille. Outre que l’expression est doublement désagréable à l’oreille et à l’esprit, on s’esclaffe en effet (lolement, forcément) à l’idée que quelqu’un a pu croire que Céline Minard aurait foiré Bastard Battle ! Et du point de vue du “travail de la langue” encore ! Là, on se roule par terre… Oui, mes frères, aux étourneaux rien d’impossible, aux kangourous non plus. Notre petit doigt ne serait pas étonné que l’auteur d’une pareille bêtise soit un adepte des portes ouvertes du “pour moi l’écriture tu woua” , le débat nombriliste gluant dans lequel se contorsionnent depuis des décennies les langues-de-bois de la littérature, les petites-gouttes de la plume, les tracassins de l’imagination.
Si l’on avait du temps, nous en réserverions un peu pour pondre l’anthologie des conneries gratinées énoncées et rédigées sur ces deux gimmicks fondamentaux du Temps Stérile : “Pour moi l’écriture tu woua” et “Le travail de la langue”.

Nous songeons aux mânes de Gide et à Ehni qui pourraient s’en donner à coeur joie de nouveau !

- Qu’est-ce que tu fais en ce moment ?
- j’ai décidé de me consacrer au travail de ma langue.
- trompette ?
- Non, littérature.
- Non ?
- Si !
- Merde…

Passons, nous n’allons pas dévoiler illico notre projet “P”. Précisons donc une bonne fois pour toutes que Céline Minard ne “travaille” pas au “dynamitage de la langue” sans parvenir à ses fins.
D’ailleurs, qu’on nous signale ici et maintenant l’équivalent qu’elle aurait aujourd’hui en France en terme d’audace, d’originalité et de plaisir donné à ses lecteurs ?

A mon avis, vous pouvez ramer pour répondre à cette question.
Et n’essayez pas de nous fourguer le nom d’Haenel, s’il vous plaît.

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