le XXe siècle de Benjamin Crémieux

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Remarquable esprit de son temps, Benjamin Crémieux (1888-1944) reste un auteur qu'on ne lit plus qu'exceptionnellement. C'est dommage, même s'il reste accessible en librairie dans ses traductions de l'italien (Svevo, Pirandello). A l'instar de Jean-Richard Bloch par exemple, il fait partie de la cohorte des essayistes de prime importance qui, s'ils ont compté en leur temps, ont fini par se ranger humblement dans le second rayon.
Ces princes de la critique, auxquels on doit associer Jaloux (Edmond) ou Pia (Pascal), afin de ne pas oublier ces deux derniers quand on a tenté de nous faire prendre Frédéric Lefèvre et Maurice Martin du Gard pour des lanternes, bref, ces princes de la critique étaient d'un temps où le geste critique, justement, valait pour ses principes de clairvoyance, d'appréciation, de culture générale et de maturation. Toutes choses qui ont disparu de la presse papetière où l'on empile les papiers comme le loufiat les soucoupes. Et avec la même grâce.
La réédition du XXe Siècle de Crémieux est donc une très bonne chose : on y redécouvre ce qu'est prendre le temps de se cultiver, de lire, puis de réfléchir, et enfin de s'exprimer clairement. Bien sûr, on regrette que Crémieux n'ait pas eu le souci de mettre en évidence des auteurs moins "téléphonés", mais il faisait avec son temps, contingence imparable, comme nous faisons avec le nôtre - à ce propos, on ne devrait pas écrire en 2010 que Luc Durtain ou Pierre Hamp sont des auteurs méconnus, tout de même...
Son recueil d'articles de 1927, ici augmentés de deux textes sur Edmond Jaloux, "le moins attardé des critiques" selon Gide, et les frères Tharaud, ces "stylistes", témoigne d'un modernisme qui nous est devenu poussiéreux, certes, et fort gallimardien, certes itou, mais XX Siècle sert désormais à éclairer la figure de Benjamin Crémieux (nette préface de Catherine Helbert) et l'histoire de la réception de quelques grands noms et de certaines gloires déclinantes des lettres françaises du siècle dernier. De plus, au petit jeu des absents, il nous invite à jouer...
Au sommaire de cette nouvelle édition : Marce Proust, Jean Giraudoux, Henri Duvernois, Pierre Hamp, Valery Larbaud, Jules Romains, Pierre Benoit, Pierre Mac Orlan, Paul Morand, Pierre Drieu La Rochelle, Jean Paulhan, Luc Durtain, Henri Pourrat, Jerôme et Jean Tharaud, Edmond Jaloux.


Benjamin Crémieux XXe siècle. Edition augmentée. Textes établis, présentés et annotés par Catherine Helbert. - Gallimard, 2010, coll. "Cahiers de la NRf", 304 pages, 26,50 euros

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