Le poète le plus triste de Provence

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Lavandière, de Paul Guigou (l'autre)



C'est Paul Guigou qui remporte la palme, selon Émile Ripert dans Le Feu du 1er mai 1909, du poète le plus triste de Provence.
Il en fallait un...
A noter que, par un hasard cocasse, Paul Guigou est aussi le nom du peintre le plus célèbre de paysages provençaux.


Paul Guigou (1865-1896) fait partie de la cohore des poètes morts jeunes, avec Amédée Prouvost, du Norch' celui-ci, ou encore Charles Doury, qui n'a pas même eu le temps de composer un recueil de ses poèmes dispersés en revues, si l'on en croit Eugène Marsan dans Le Divan (mai-juin 1909). On sait que Guigou fut en Auvergne le précepteur des enfants de Gyp, la comtesse de Martel, et que pour des raisons de santé il dût quitter sa place (reprise par Jules Tellier) et rejoindre sa Provence natale (31) (il est né et mort à Marseille). Apprécié de Maurice Barrès et de Jules Tellier, il avait été le fondateur de la Revue moderniste (1885) et dirigea le musée de Marseille à partir de 1894?
Laissons la parole à Marsan, qui, sur les talons d'Émile Ripert, signe un très beau textes sur la mélancolie des terres brûlées :

« (...) Rectifions nos connaissances. M. Émile Ripert, dans Le Feu (15 mai), nous y engage. Il y a une tristesse provençale et l'on ne s'en doute pas. Nous autres, hommes du Nord surtout, nous concevons mal qu'il existe là-bas des représentants de notre mélancolie qui émane du ciel gris et de l'atmosphère ouatée de nos villes. C'est pourtant ainsi. Et M. Émile Ripert écrit à ce propos des pages neuves et fort poétiques « Il faut saisir les nuances et les heures diverses du pays provençal, y avoir vécu de longues années et, plus encore que le tiède hiver ou le doux automne, y avoir connu l'énervement du printemps et l'écrasante mélancolie des étés trop riches et trop lourds. Il faut avoir vu le soleil sombrer au fond de la Crau, tandis que de l'immense étendue stérile monte toute l'ombre violette, comme une vapeur de mort, et que les troupeaux se tassent en frissonnant. Alors, la plaine de pierres semble une grande âme désolée où s'éteignent les derniers sentiments d'amour et d'espoir.
« Ce qui rend originale la tristesse de la Provence, c'est qu'elle émane surtout de ses plus parfaits paysages, aux plus belles minutes des plus beaux mois. Cette tristesse filtre à travers toute la légende et la littérature du pays provençal. Et M. Émile Ripert, en des pages émouvantes, évoque la physionomie de Paul Guigou, un délicieux poète mort jeune, et qui fut le plus incurablement triste de tous les poètes de Provence.




La Société nouvelle, juillet 1909, p. 122.

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