Maurice Rollinat tout inédit (tout explicite itou)

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Dites "Rollinat", on vous répondra "Les Névroses". C'est pavlovien.
Et preuve que la pédagogie lagarde-et-michalesque a rempli son office, suivra le commentaire savant : après Baudelaire, Maurice Rollinat. Avant Maurice Rollinat, Baudelaire. Point.
Ce qui n'a pas empêché Maurice Rollinat de pourrir en purgatoire avec ces deux volumes de poèmes tandis que cette vieille Baude est archireproduite dans un nombre d'éditions proprement effrayant. Et là, il faut bien considérer tout de même que Rollinat n'est même plus disponible dans sa version Minard (avec la couverture en nappe de cuisine verte) des années 1971-1972. Alors ? Pour une fois que l'on tient un chantre du dérèglement nerveux total positionné entre Baudelaire et Maupassant... Que fais la Sorbonne ? On s'interroge...
Dans ce contexte, il est encourageant (très) de voir paraître les pièces manquantes, censurées par son éditeur ou autocensusées par l'auteur lui-même, ce que l'on pourrait nomme les Névroses évanouies. Grâce à Claire Le Guillou, qui, en travaillant à la correspondance de Rollinat (1), est parvenue à trouver trace des pièces ébarbées des recueils imprimés — pièces érotiques et politiques —, voici cent soixante-dix pages supplémentaires dans la bibliographie rollinesque, servies dans un très joli volume - et même un volume charmant - relié et sous jaquette illustrée (par Killofer) - qui constitue d'ores et déjà une très très belle idée de cadeau pour tous les bibliofilous de France. Sans char, prenez note.
Pensez : en substance, des filles de mauvaise vie, des virus, de la syphilis, des langueurs criminelles et des accès turpides, c'est tout le Rollinat que l'on aime, traquant le gandin malsain et le satyre "Ayant tous les démons de l'hystérie au cul" qui s'en va, "l'esprit par la viande vaincu"

"Les cheveux au vent, fou, les temps embrasées,
Il s'enfonçait, hagard, dans les Champs-Élysées,
Hanté par des tableaux obscènes. Il pensait
Au téton virginal ferme sous le corset
Dont il aurait voulu sucer le bout si rose.
Des corps de femmes nus dans la plus sale pose,
Jambes en l'air, le con entrebâillé, le doigt
Au clitoris (...)"

Et on en passe.
Cette fois, amies, amis, Rollinat est en toutes lettres, sans fard, la plume authentique et vraie, sans paravent, et le poète y va sans se détourner de son inspiration. C'est à la fois surprenant et terrible, agréable et fort, c'est Maurice Rollinat. Incontournable donc, quand bien même on vivrait éloigné de La Châtre et de Châteauroux où survit encore son souvenir, comme ceux de Sand, de Maurice Sand, de Gabriel Nigond, de Georges Lubin ou de Jean de Boschère...

Maurice Rollinat Le Cabinet secret. Pièces érotiques et politiques inédites (1864-1897). Édition établie, présentée et commentée par Claire Le Guillou. — Paris, Éditions du Sandre, 2014, 180 pages, 14 € Jaquette illustrée par Killoffer




(1) Et à ce volume intitulé, Maurice Rollinat, ses amitiés artistiques (Châteauroux-Nantes, Musée-Hôtel Bertrand-Joca seria, 2003).

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