La mort de Léon Bonneff dans Le Figaro (1915)

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On annonce la mort de M. Léon Bonneff, rédacteur à l'Humanité, qui, blessé d'une balle allemande sur le front des Vosges, a succombé à l'hôpital de Toul.
Léon Bonneff a écrit avec talent des « choses vues », pittoresques, exactes et heureusement écrites. En collaboration avec son frère cadet, Maurice Bonneff, rédacteur à la Dépêche de Toulouse, il a écrit deux ouvrages : Les Métiers qui tuent et la Vie tragique des travailleurs.
2 janvier 1915, p. 3


La Forge
Combats d'artillerie. Maintien des positions gagnées. La pluie incessante, qui détrempe le sol, arrête des opérations.
La presse anglaise revient sur la lutte qui, dans les derniers jours de décembre, s'est poursuivie, dure partout, acharnée partout, marquée sur presque tous les points par des progrès, de la mer du Nord à la frontière suisse. Elle en parle avec, une admiration que relève encore un vif sentiment d'émulation. Voilà cinq mois que les Anglais combattent avec nous, faisant preuve d'un fier courage et de cette ténacité d'airain, leur vertu nationale, qu'ils s'étonnent un peu de trouver également chez nous et qu'ils apprécient en connaisseurs. Mais ils se trouvent trop peu nombreux sur notre front de deux millions d'hommes; ils voudraient voir plus rapidement au front les nouvelles armées que prépare lord Kitchener avec une inlassable activité; ils réclament « une part plus grande aux futures batailles ».
Le « témoin oculaire » raconte des épisodes de l'attaque dans les Flandres maritimes. Sur les dunes, dans les plaines inondées, autour des ruines du village désormais fameux de Saint-Georges, les troupes engagées se battaient avec de l'eau jusqu'à,la ceinture pendant que la côte retentissait du tonnerre des gros canons de la flotte. Les combats n'ont pas été moins ardus dans l'Argonne. On écrira, un jour, sur cette guerre redoutable, héroïque de l'Argonne, un livre qui sera un manuel incomparable de vertus militaires. C'est dans ces bois de l'Argonne qu'est tombé, en entraînant; ses hommes, l'un des six petits-fils de Garibatdi qui combattent dans nos rangs. Leur père, Ricciotti. avait enlevé, il y a quarante ans, à la bataille de Dijon, un drapeau allemand. Bruno est enseveli dans les bois où il est tombé. Un capitaine, qui est prêtre, revêt les vêtements sacerdotaux et donne la bénédiction. Le général Gouraud préside la cérémonie : « Vous tous, soldats italiens et soldats français qui êtes venus dormir votre dernier sommeil sur le champ de gloire, vous ne serez pas oubliés. Nous vous vengerons. »
Qu'elle est longue la liste de ceux qui sont tombés pour la défense de la patrie et du droit, héros anonymes, jeunes hommes entrés déjà dans la renommée, hier l'un des deux frères Bonneff, qui avait sondé, si profondément, si courageusement, les misères sociales, l'auteur de ce beau livre : les Marchands de folie !
Guerre libératrice qui, pour la reconstruction d'une France digne de celle qui combat aujourd'hui, nous libérera aussi de l'alcoolisme! On l'a dit avant la guerre : « L'antialcoolisme est une des formes du patriotisme, du seul patriotisme qui compte : de celui qui agit. » Dans quels temps le patriotisme a-t-il été plus actif ? Voyez ces jeunes classes, impatientes d'une instruction nécessaire, trop lente à leur gré. Le colonel Repington et le colonel Feyler ont cherché récemment à évaluer les réserves militaires de l'Allemagne. Si considérables qu'elles soient, elles trouveront à qui parler, armées anciennes, armées nouvelles. Le marteau frappe sur l'enclume - La forge du Niebelung n'est pas seule à travailler.
Polybe.
4 janvier 1915, p. 3

Un prix
La commission de la Bourse nationale de voyage littéraire, présidée par M. Emile Blémont, a désigné à l'unanimité le poète Christian Frogé, sous-lieutenant au 43° colonial, grièvement blessé à l'ennemi, ainsi que les familles de Léon Bonneff et de René Tautain, jeunes écrivains morts au champ d'honneur, comme bénéficiaires des trois allocations de mille francs destinées à remplacer cette année le Prix National de littérature.
Cette décision a été votée à l'unanimité.
11 décembre 1915,; p. 3.


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