Mauvais traitement en mer d'Okhotsk




Le nez du menuisier n'arrêtait pas de couler, probablement à cause des larmes qui s'écoulaient à l'intérieur. Il se moucha à nouveau. Puis il saisit un marteau qui brinquebalait dans sa poche latérale et se remit à l'ouvrage.
Soudain, alerté par son oreille, il regarda en arrière. Le câble remuait, il semblait secoué par en bas. Et de là parvenait un bruit sec et lugubre.
L'ouvrier pendu au bout du câble avait un rôle de teint. De la bave s'écoulait de ses lèvres crispées, cadavériques. Quand le menuisier redescendit de l'endort où il travaillait, il vit le contremaître en train d'uriner dans la mer depuis le pont, dans une position peu naturelle, une épaule relevée, une bûche coincée dans la ceinture. Le regard du menuisier passa sur la bûche. "Alors c'est donc avec ça qu'il l'a frappé." A chaque bourrasque, l'urine frappait en chuintant le bord du pont et rebondissait en gerbes.



Takiji Kobayashi Le Bateau-usine, traduit par Evelyne Lesigne-Audoly. — Paris, Yago, 2010.



Ajouter un commentaire

Le code HTML est affiché comme du texte et les adresses web sont automatiquement transformées.

Haut de page