Maison des autres

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1.

Soudain, du sentier des pâturages, mais encore très loin, arriva l'aboiement d'un chine. Tous nous levâmes la tête. Puis de deux ou trois chiens. Puis le bruit des clarines de bronze.
Penchés autour de la paillasse, à la lueur de la bougie, il y avait moi, deux ou trois femmes de la maison, plus loin quelques vieilles du village. Jamais assis té à une leçon d'anatomie ? Bon. La même chose pour nous, en un certain sens. Dans le cercle rougeâtre du lumignon, tout ce que pouvait voir, c'était nos six visages soudés les uns aux autres comme devant une crèche, cette paillasse au milieu, un bout de mur noirci par la fumée et une poutre noire encore davantage. Tout le reste était sombre.
"Rien entendu, vous les femmes ?" dis-je en me levant d'un coup.
La plus vieille prit le lumignon et alla lentement ouvrir la fenêtre. Pendant un instant, nous fûmes tous dans le noir.
L'air tout autour était violet, et violets sentiers, l'herbe des pâturages, les ravines et les crêtes des montagnes; et dans cette ombre, au loin, nous aimes descendre ver les village quatre ou cinq lanternes.
"Ce sont les hommes qui rentrent des pâturages, murmura-t-elle en revenant vers nous, et dans dix minutes ils seront là."
C'était vrai, et je respirai. Les mots me font honte, voilà la vérité : et les adieux 'non jamais été pour moi. Surtout ceux-là. Sans en avoir l'air, je me dirigeai vers la porte.
"Alors comme ça, monsieur le curé", me dit l'une d'elles en s'approchant derrière moi, "nous, on le lave et on lui fait la barbe : et pour ce qui est de l'habiller les autres y penseront cette nuit." (...)




Silvio d'Arzo Maison des autres. — Traduit de l'italien par Philippe Renard et Bernard SImeone. Préface d'Attilio Bertolucci. — Verdier, coll. "Verdier poche", 89 pages, 6,20 €



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