Le Jardin de Winter

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Le Jardin de Winter, premier roman de Valerie Fritsch, une jeune Autrichienne née en 1989, mérite un coup d'oeil.
Dès les premières pages, il apparaît qu'il est joliment tressé d'une phrase élégante, puis il se poivre et rencontre les limites de son univers, quitte le jardin en quelque sorte. Il se trouve un moment où on arrive en bord de mer, et, là, les cadavres s'accumulent. Un peu métaphoriquement, il est vrai. Mais son personnage vivant de l'élevage d'oiseaux au sommet d'un immeuble dans un monde en berne emporte l'adhésion. Il est fallot mais il existe où tout meurt, excepté les enfants, qui jouent dans la rue.
Au fil des pages, on est frappé d'une évidence : Valerie Fritsch nous soumet à des scènes éminemment cinématographiques qui imposent la rêverie. Le jardin familial par exemple, un jardin plus que familial, véritablement communautaire, le duo des vieux qui va voir la mer en train et revient se couleur dans la paix campagnarde, ces nuées de canaris qui se posent sur le toit des voitures, ces voisins observés par la fenêtre qui se suicident avec le fil de leur téléphone - on est donc dans une région où les téléphone ont encore des fils... Il y a bien aussi ces bocaux d’embryons que la grand-mère conserve dans un appentis, mais l’ambiance est plutôt à la douceur.
Reprenons le fil depuis le début : la vie s’écoule et l'enfant Anton devient adulte. Comme on l'a deviné, il est installé dans une ville située en bord de mer où le sel cristallise sur les montants de fenêtre. (Ici, on se surprendre à penser au récent Sporting Club d’Emmanuel Villin (Asphalte) — sauf que la ville d’Anton ressemble plutôt au Paysage avec palmiers de Bernard Wallet (Tristram), dans une tonalité moins guerrière cependant. Certes il y a la mer, mais le monde est finissant et la mort nimbe tout le monde ou presque. Restent l'enfance et les enfants qui donnent corps à une rédemption pour l'humanité. C'est tout le sujet de la seconde moitié du livre, beaucoup moins envoûtante, il faut l'admettre : c'est le trouble d'un monde un peu mystérieux, déliquescent et ouaté qui rendait les pages accueillantes.
Pour conclure, le court roman de Valerie Fritsch fonctionne comme une allégorie de l’existence peuplée d’oiseaux et d’êtres humains flous ou fous, qui tournoient très cinématographiqument autour des deux héros. Les figures vivantes rendent la fable attachante un moment et puis cet évidence de la fable s'errode en atteignant des régions plus banales de l'être humain..
Tout à une fin.


Valerie Fritsch Le Jardin de Winter. Traduit de l'allemand par Tatiana Marwinski. — Paris, Phébus, 144 pages, 14 €

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