Derrière l'abattoir : les récupérés

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(...) Si Je n'aime pas beaucoup le titre du roman de M. Albert-Jean : Derrière l'abattoir, j'en aime l'âpre accent et le style soigné. On nous a annoncé la fin du livre bien écrit ; mais ce qui est fini pour les uns ne l'est pas pour les autres, heureusement.
On n'ose pas parler, je le remarque, de ce terrible réquisitoire d'Albert-Jean contre le service de santé pendant la guerre. Car le sujet du roman, ou plutôt de la fresque, est exposé dans ces lignes de la préface :
« En 1917, Moloch, exigeant des fournées nouvelles, ce fut alors que l'on décida de passer au crible, une fois de plus, les déchets virils, de l'arrière et que l'on décréta la récupération, c'est-à;-dire la mobilisation des malades, des éclopés, des malfoutus. »
AJbert-Jean les fait défiler devant nous, accompagne à toutes les stations de leur calvaire le cardiaque, l'épileptique, le tuberculeux. auxquels on refuse la réforme et qui meurent, inutiles, de ce refus impitoyable ; et c'est poignant comme le chef-d'œuvre de Dostoiewski : Souvenirs de la Maison des Morts.
Je comprends la colère vengeresse d'Albert-Jean contre « les képis laurés de velours » qui, derrière l'abattoir, prétendaient y envoyer des malheureux sans vigueur et sans souffle. C'est évidemment un témoin qui dépose, et sa bonne foi n'est pas douteuse. (...)


Lucien Descaves


Le Journal, 16 avril 1923


Albert-Jean Derrière l'abattoir. Couverture de Sem. Préface du Préfet maritime. - Talence, L'Arbre vengeur, coll. "L'Alambic", 176 pages, 13 €

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