Touchagues (1926)

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Touchagues
Dans la vie, Touchagues est un garçon musclé, bistré et brun comme un cigare cher. Il a inventé un art à lui, qui participe du dessin, de la peinture, de la charge, quelque chose qui parait simple, et qui est d'une subtilité infinie, qui semble indulgent et qui montre une cruauté de cannibale, une manière unique où la plus folle fantaisie sert de Véhicule à une volonté très nette, à des soucis esthétiques très réfléchis.
Il est né à Lyon. A huit ans, il composait, son premier dessin. Je jure que rien n'est ici exagéré.
C'était — il m'en souvient, - à la première page d'un journal illustré qui s'appelait Le Rigolo et dont il fut le fondateur, le rédacteur, l'illustrateur et le lecteur. Ce dessin — en couleur naturellement — montrait un superbe colonel qui regardait ses manches, éperdument galonnées. Légende : — Et dire que je suis colonel !
C'est une des belles que je sache.
Touchagues, comme tous les Lyonnais qui ont des aptitudes pour les arts, fut dessinateur de soierie. Il composa les belles étoffes que vous savez, et apprit là, outre le goût des belles matières, la technique d'un art où rien n'est laissé au hasard.
Puis il fit comme tout le monde, bien qu'il ait horreur de ça : il vint à Paris. Et là, en quelques années, par la seule force d'une fantaisie qui s'est imposée irrésistiblement, il a fait son trou, sa place. Quelques envois aux Salons (pas à celui des Artistes Français 1), quelques expositions, ses feux d'artifice annuels de L'Araignée, la collaboration la plus assidue aux principaux journaux, magazines, revues de France, d'Amérique, d'Allemagne et voilà la firme Touchagues connue et appréciée.
Vous verrez bientôt une nouvelle face du talent de Touchagues quand paraîtra l'édition de luxe de la Jeanne d'Arc de Delteil, qu'il a illustrée. Il y a là des lithographies colorées, d'une fantaisie et d'une variété inimaginables, de plaisantes synthèses, de gracieux raccourcis, bref, l'équivalent exact des qualités qu'on s'est accordé à trouver à Joseph Delteil. Rarement l'accord entre autçur et illustrateur aura été plus complet.
Puis. avez-vous vu,, au Salon Politique, sa c Salle des Pas-Perdus » ?
Non ? Alors, qu'est-ce que vous attendez !.
Avec ça que les occasions de se réjouir sont si nombreuses à notre époque.

Pierre Scize


Paris-Soir, 10 juillet 1926

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