Les amateurs de l'esprit taquin qui parfois s'épanche en littérature peuvent se réjouir : si Jules Renard ne signe pas son grand retour, c'est Cécile Villaumé qui nous revient. Et elle est en pleine forme.
A travers des nouvelles qui fonctionnent par paires, ou en miroir, siamoises si l'on veut, elle se régale de la bêtise humaine et nous fait profiter de ses grains de sel aux qualités thérapeutiques désormais notoires à propos des épizooties, du trafic d'animaux sauvages, des descendants du Petit Nicolas en milieu scolaire contemporain, de l'épaisseur sans nom des parents d'élèves, un peu de stryges, de ratés un peu glorieux, d'une fameuse comtesse d'origine russe (et de Ségur), de ce séducteur de Landru, des rudes réunions du collectif "Les Mécompté.e.s" (féministe, antiraciste, antivalidiste), du goût pour la photographie "artistique" de Zohra Ben Brahim attrapée auprès de Pierre Louÿs qu'elle avait rencontré à Alger en 1897... et de quelques autres sujets qui font de notre époque notre époque.
Il ne se voyait pas comme une éponge, mais comme une antenne. Pour écrire comme ces tâcherons, il aurait fallu les lire, et Vincent ne les lisait pas. En revanche il captait une fréquence, c'était évident, la fréquence des Grands Ratés.
Composé d'histoire littéraire, de fantaisies fictionnelles et de commentaires persifleurs, le mixte composé par Cécile Villaumé se situe dans la parfaite continuité Des écrivains imaginés dont nous avions ici beaucoup parlé.
Foi de Préfet maritime, vous avez là de quoi vous amuser.
Cécile Villaumé Histoires siamoises. - Paris, Le Dilettante, 191 pages, 18 € (le tirage de tête - qui s'impose - 60 €)
1 De Jacques Lèbre -
Mon cher Eric, je viens de lire ton édito dans le "Matricule". A partir d'un extrait de Jacques Dupin : "La poésie telle qu'elle est reçue, ou plutôt éconduite, égarée, perdue de vue, me suffit et me comble. Elle n'est pas, et refuse d'être, un genre littéraire, un produit culturel, une marchandise éditoriale. Elle est, par bonheur, déficitaire dans les calculs de marketing. Elle est irrécupérable par l'ordinateur de la diffusion et la herse médiatique. Elle n'a pas de rayonnement au sens où vous l'entendez car elle a renoncé, depuis le premier jour, à l'éclat public, pour l'irradiation dans le corps obscur, la déflagration invisible et les transmutations souterraines." Sylvain Tessson restant son parrain, j'ai demandé au Printemps des poètes de me déréférencer de sa liste de poètes, ce qui a été fait. Amitiés.