Le Portrait du jour
Maurice Prax
Maurice Prax est fils d'officier supérieur.
Mais il n'en a pas moins choisi une honorable carrière.
A dix ans, il était sergent-major.
Je me hâte de compléter cette information en précisant qu'il était sergent-major au Prytanée militaire de La Flèche, que son père dirigeait.
Après avoir étudié son droit à la Taverne du Panthéon, après s'être perfectionné dans la science de l'Economie Politique en fréquentant la pâtisserie fameuse du boulevard Saint-Michel, Maurice Prax obtint, comme couronnement de ses efforts, un prix, durement disputé, en une course à bicyclette.
Ces fortes études firent de lui un homme complet et non un personnage nourri seulement de doctrines et de traditions,
A treize ans, il étaÏt déjà rétribué pour sa collaboration littéraire, à raison de vingt francs par mois. Il écrivait alors des contes où il commentait avec virtuosité la tristesse de vivre et se répandait, mélancoliquement, sur la cruauté des déceptions amoureuses.
A quinze ans, il collaborait au Rire. A dix-neuf ans, il était rédacteur en chef de la Vie Parisienne.
Rien de mieux justifié que la promptitude de cette carrière.
Maurice Prax a le sentiment inné de la drôlerie, et il est doué d'un esprit fertile, ingénieux, personnel, très délicat, et, néanmoins, perceptible pour les lecteurs ordinaires.
Aussi ne fut-on pas surpris quand on apprit que, après avoir collaboré à un grand nombre de journaux gais, et au Matin, dont il avait été un des principaux rédacteurs et informateurs de grande classe, il était chargé de rédiger, pour le Petit Parisien, l'article quotidien intitulé Le Pour et le
Contre.
C'est une tâche difficile que de contenter un immense public sans pour cela s'avilir en se faisant le porte-parole des imbéciles.
Maurice Prax, au lieu de flatter les bas instincts de ses lecteurs, les éduque en les divertissant. Il a du bon sens sans se priver d'être spirituel selon son aptitude coutumière. Railleur, mais prompt à s'enthousiasmer, tendre comme le sont souvent les sceptiques de chez nous, virtuose en trouvailles verbales, c'est un Français, un pur Français. Il l'est autant par la pureté de son style que par tes grâces de son caractère.
Paul Reboux