La nature se réveille (informations variées)


C'est le printemps avant l'heure. Il neige pourtant ce matin, c'est curieux. Si nous ne disposons pas cette année d'un nid où naîtraient de distrayants zoizillons — s'étant invité chez nous, un jeune chat s'entraîne assidûment, quoique maladroitement, à la chasse sur nos terres —, l'imprimerie nous fournit de quoi attirer notre attention, réveiller nos lobes endormis par les fraîches températures de saison. Quoique sur nos îles... Passons.

A tout seigneur, tout honneur : c'est d'abord Charles Cros qui reparaît à l'Atelier du gué dans une nouvelle édition de ses exercices spectaculaires, ''Saynètes et Monologues'', aux origines des one-man-show de nos comiques télévisés d'aujourd'hui, rien de moins.

Suit dans notre boîte aux lettres la troisième et roborative livraison de la Revue L'Oeil bleu, avec un sommaire aussi riche que les précédents, riche et très original. Depuis le temps que l'on explore les fins-de-siècle, soit depuis plus d'une trentaine d'années, certains sujets ont été largement contournés. Il était inévitable qu'un lecteur malin, curieux, fin et obstiné tel que Nicolas Leroux s'y penche à y tomber.
Sa chute, que nous espérons douce, a été des plus bénéfiques. Un peu comme celle de certaine pomme sur certain crâne à perruque. La preuve par le papier imprimé : Leroux et son complice Henri Bordillon nous mènent à la découverte du "Mystérieux Schilt de Monclar : entre Gustave Le Rouge et Hugues Rebell" (oui, le Monclar de la Bibliothèque des Curieux), pousuivent la "Promenade abécédaire avec Gustave Le Rouge et Blaise Cendrars", réveillent les morts Roger Dévigne (dont nous aurons à causer ici prochainement) en buveur d'encre bohème, ou Gabriel-Tristan Franconi, l'artiste d'Untel de l'armée française, qui succomba "au champ d'honneur" le 23 juillet 1918, poussant Guillaume Apollinaire à la rédaction d'une notice nécrologique pour le Mercure de France. Franconi fut regretté : Jean Pellerin et Gaston Picard ne manquèrent pas de l'intégrer à leurs Figures d’aujourd’hui (E.-F. D’Alignan éditeur, 1923). Autant de preuves qu'il faut lire L'Oeil bleu sans discuter ni tarder.

Vient ensuite la promesse d'une cinquante-quatrième livraison de Théodore Balmoral où se pressent Jacques Audiberti, Jacques Réda (salutations), Jean Paulhan, Thanassis Valtinos, Jean-Pierre H. Tétard, John Taylor, Mina Süngern, Jean Roudaut, Odette Pagier, Gilles Ortlieb (salut !), Frédéric Limagne, Victoria Horton, Denis Grozdanovitch, Christian Garcin (salut !), Josiane Fournier, Jean-Luc Fougeray, Cyrille Fleischman, Laurent Fassin, Jacques Falletti, Denis Borel et Bernard Baillaud (signe amical). On en oublie sans doute — ils nous pardonneront ! Entre "Anagramme" de Réda et les nouvelles huit lettres de Paulhan à Audiberti, une nouvelle rubrique, "Souvenirs déterminants", où se succèdent onanisme et impuissance (c'est écrit, je n'invente pas), on ne sait pas vraiment où l'on entamera le volume... Sans compter qu'Audiberti rappelle Dostoïevski à Paris, que de Grèce nous parvient de la nicotine et du Marais de Paris un "Calendrier de la révolte". Bigre, c'en est donc là...

Au rôle des revues naissantes et sans cesse renaissantes, quelques lignes velues à ajouter :

Apparaît notamment la revue Le Grognard, lisible sur l'écran et librement imprimable avec

  • Vincent Dubuc : Anarchisme et Alcoolisme
  • Christine Lartigue : Individualisation contre individualités
  • Stéphane Beau : Contingences 1 & 2
  • Thierry Guérin : Le Long des jours silencieux (extrait)
  • Frantz Jourdain (1847-1935) : La Foule
  • Olivier Brochiero : Billet d'Humeur
  • Ygor Yanka : Eros cui-cui
  • Thierry Guérin : Vieil Homme (poème)
  • Stéphane Beau : Du côté des livres

Apparaît aussi sur le blog du Nouvel Obscurantiste, que nous citons, mention de la revue

« Reflet, n° 11, parue le mois dernier, et divisée en trois parties. La première rassemble des traductions d’humoristes juifs new-yorkais plus ou moins amusants, la deuxième des comptes rendus de livres de et sur Karl Kraus. La troisième, la plus composite et agréable, est un canevas de notes sur les lectures et les rêves, de croquis sur le vif, de pensées diverses. La revue est un beau petit objet de 14 x 18 cm, à la mise en pages élégante, au façonnage soigneux, les feuilles sont reliées en cahiers cousus sous une couverture à dos carré. En contrepoint du zèle apporté à la perfection technique, on s’étonne de constater une indifférence à peu près totale aux convenances de l’écriture française. En recomptant à vue de nez les bâtons que je trace machinalement dans la marge à chaque fois que je tombe sur une faute, une coquille ou une incongruité, j’approche les 200 unités, ce qui n’est pas rien, sur 84 pages. Mais peu importe. Fait rare, la revue est gratuite, je transmets le message aux amateurs : « Pour recevoir Le Reflet, envoyez un(e) enveloppe A5 comportant votre adresse et affranchie à 1,60 € à l’éditeur : Laurent Fairon, 2 rue Collette, 75017 Paris. »

Voilà l'information transmise sur cette publication plus mal corrigée encore que l'Alambic, est-ce possible ? Bien au fait de la technique de l'inabonnement pour l'avoir mis en oeuvre il y a maintenant plus d'un lustre (cf. Vie, mort et résurrection de ''l'Alambic''), nous avons d'ores et déjà posté notre enveloppe pour ne rien rater. A vos carnets de timbres : dans l'imprimé tout est bon, même la coquille.

Ensuite, la revue Marginales (n° 6) consacre un fort dossier à « Stig Dagerman, la littérature et la conscience » où Philippe Geneste, Freddy Gomez donnent leurs lumières sur Dagerman, le « journaliste et écrivain de la lucidité ». Avec, en prime, tout un chapelet d'inédits des années 1943-1954. Franchement incontournable, à ce qu'il paraît. Ajoutez à ce menu des nouvelles d'une "nouvelle littérature prolétarienne" (Folke Fridell, Ivar Lo-Johansson et al.) et un Cahier de littérature (Jann-Marc Rouillan, Simon Armitage, Jérémy Beschon et Jean-Battiste Couton) et vous obtenez l'une de vos prochaines lectures. Sans blague.

Fragmentos (n° 31), la « Revista de língua e literatura estrangeiras » de Florianópolis (Brésil) rend à Charles Nodier ses internationaux lauriers grâce à Jacques-Remi Dahan. On y cause des Proscrits (H. Hofer), des Bruits de fantômes (D. Sangsue), des romances pseudographes de Clotilde (J.-F Jaeandillou, d'un petit Francisque Michel, mauvais élève (D. Barrière), du physique multiforme de Charles Nodier (C. Galantaris), bref, on y déploie sans doute des trésors de savoir et des pistes qui mèneront — qui sait ? — à des oeuvres complètes (enfin) de Charles Nodier. Mais ce n'est pas gagné.

Le Nouvel Attila nous informe que le Gog de Giovanni Papini sortirait aux alentours du 1er avril (ou avant, si dieuleveut), avec 69 dessins de Remi. Cette édition constituera donc la première traduction française intégrale du fameux roman ambivalent. Cinq chapitres avaient été mystérieusement écartés de l'édition Flammarion (1932) dont deux, "Les villes ultramodernes" et "La Forteresse sur la mer" seraient parmi les meilleurs. Ah, ah...

Au passage, agitons pro domo le fait que Gog figure en bonne place dans Comme des enfants, l'âge pédophile du capitalisme, un pamphlet dont Jean-Luc Moreau a parlé jeudi après-midi sur Radio Libertaire dans son émission "Bibliomanie".

Ajoutons, fine mouche, que se trouvent en vente sur e-bay Le Roc d'or, grand roman d'aventures, de mer et de phynance de Théo Varlet (le tirage a été pilonné par la maison Le Rocher — Le Roc d'or au Rocher de Monaco : ils en auraient fait leur mascotte s'ils avaient été dotés d'un peu d'espièglerie, ou de culture) ainsi que La Littérature est mauvaise fille (pas pilonné celui-là).

Signalons aussi que le billet consacré à l'art des enfants et au projet de musée par Claude Ponti a été mis à jour.

Enfin, mentionnons un fragment inédit de Fernand Combet dans un collectif anniversaire des éditions Verticales au titre dubitatif : "Qui est vivant ?" Et c'est bien ce que l'on se demande, tout en ayant tendance à répondre : ceux qui ne sont pas morts. Reste à connaître les causes du décès et l'état du cadavre. Le volume apporte quelques réponses. Le fragment de Combet en question, issu de Mort et Passion de Félix C. Scribator a été choisi par Renée Combet, que l'on salue ici.

Pour finir, cette réjouissance toute bibliofiloute : l'acquisition pour un prix ras du plancher de sept lettres de Marc STEPHANE à ses éditeurs (Savine notamment) des années 1890 nous met le coeur en joie plus qu'on ne le saurait dire. Nous serons d'ailleurs amené à vous parler de Marc Stéphane dans les semaines qui viennent à l'occasion d'une reparution tonitruante — et les céliniens savent bien de quoi l'on parle ici.


Charles CROS "Saynètes et monologues". — Villelongue d'Aude, L'Atelier du Gué, 168 p., 14 €

L'OEIL BLEU (n° 3), 64 p., 12 € — associationoeilbleu@yahoo.fr

MARGINALES (n° 6), 204 p., 15 €

FRAGMENTOS, 2006, 251 p. sans mention de prix. — revistafragmentos@gmail.com



Et, toujours, celui qui espère vos rétines :

Loys MASSON Saint Alias, préface et bibliographie par votre serviteur. — Bordeaux, L'Arbre vengeur, 2007, 135 p., 11 €



Prochainement à cet emplacement : Didier Blonde et les ombres de la nuit

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