Le musée de la mélancolie et de la ruine de toute chose

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A force de parcourir, chaque jour de l'été 1975, les rues et les maisons de la ville torride, j'ai fini par la connaître bien, je savais ses secrets et ses turpides, sa gloire et sa candeur. Bucarest, avais-je compris à dix-neuf ans, quand j'avais déjà tout lu, n'était pas comme d'autres villes qui s'étaient développées au fil du temps, remplaçant les taudis et les dépôts par de grandes copropriétés, remplaçant les tramways à cheval par des tramways électriques. Elle était apparu, déjà en ruine, en miettes, l'enduit en morceaux et le nez des gorgones en stuc déjà cassé, les fils électriques suspendus au-dessus des rues en bouquets mélancoliques et avec une architecture industrielle fabuleusement variée. On avait voulu la conception d'une ville plus humaine et plus émouvante que la Brasilia de béton et de verre. L'architecte de génie avait dessiné des rues tordues, des égouts percés, des villas penchées, des écoles inutilisables, des magasins sur sept étages, difformes et spectraux; Et surtout, Bucarest avait été conçue comme un musée à l'air libre, musée de la mélancolie et de la ruine de toute chose.





Mircea Cãrtãrescu Solénoïde, traduit du roumain par Laure Hinckel. - Paris, Noir sur blanc, 800 pages, 27 €



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