Des choses merveilleuses

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Les éditions Héros-limite n'en ont justement pas, des limites. Elles ne cessent de produire des livres magnifiques et délicats, délicieux à l'esprit et doux à la main, des pièces d'imprimerie qui font honneur à l'édition de ce premier quart de siècle. On en reparlera, vous verrez, en particulier ceux qui ont la collectionnite et emprisonnent chez eux des livres de Plein Chant, de Séquences, du Lérot ou d'André Dimanche même, parce que ce sont des livres bien faits, et dans des matériaux dignes. Des livres qui incarnent l'équilibre subtil entre la fragilité de la pensée qui s'agite comme un léger zéphyr et la rudesse mesurée d'une carte qui fait parfois ressort. La mécanique du livre est une discipline redoutable dont peu de fabricants se sortent sans encombre.
L'une des dernières preuves de ce talent est incarnée délicieux opus de Bioy Casares traduit par Julia Azaretto et Paul Lequesne, Des choses merveilleuses, un recueil d'articles où l'Argentin s'exprime sur l'essentiel. Le sien, naturellement, et ce qui, à d'autres peut paraître merveille. Des collections de timbres et de l'amour !
Se basant sur la répartition de l'humanité entre ceux qui espèrent et finissent par toucher un but décevant, et ceux qui persistent dans leur adoration de la chose tellement désirée enfin obtenue et toujours merveilleuse — un exemple, les amateurs de littérature —, Bioy Casares jette un regard enchanté sur le monde, et, plus généralement sur la vie, et en profite pour poser des questions essentielles, comme ce petit truc que l'on n'aura finalement jamais pu dire de soi...

A l'heure du thé, au club de tennis, j'ai toujours préféré le commerce des femmes. A l'époque, j'avais eu l'idée de ranger l'humanité en deux groupes, le groupe des historiens et le celui des philosophies. Au club, parmi les hommes abondaient les historiens, ils avaient une tendance à évoquer, point par point, les avaient une tendance à évoquer, point par point, les cinq sets qu'ils avaient joués l'après-midi; les femmes, en revanche étaient philosophies : elles disaient pourquoi elles avaient aimé ou détesté un film, un roman ou le comportement d'une amie. Bien sûr, pour aimer les femmes je ne manquais pas d'excellentes raisons.

Naturellement ses sujets de prédilection ne sont ni les petites voitures ni les timbres, on aurait pu s'en douter. Il nous parle beaucoup des femmes, de la littérature italienne (Buzzati et Svevo en particulier), de son intérêt pour la question épistolaire et, naturellement d' amour (toujours) dont il ne peut que constater l'ambivalence. Il est vrai que c'est une situation humaine anormale que les familles veillent d'ailleurs à cingler d'une main ferme.
Reste enfin l'humour dont Bioy Casares considère, comme Saba, comme la plus haute forme de la courtoisie.
Un petit livre à inscrire en bonne place parmi les choses qui émerveillent la vie.




Adolfo Bioy Casares Des choses merveilleuses, traduites par Julia Azaretto et Paul Lequesne. — Genève, Héros-limite, 2020, pages.


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