De délectables bourdes (II) : Régis Messac et les ailes de serpent

Portrait de Régis Messac, par Guillaume Desgranges, emprunté au riche site Ephéméride anarchiste, et probablement issu de la revue des Primaires.

Initiée le 26 juillet dernier, cette série de boulettes littéraires, « Dents de vautour et mains de serpent », se poursuit en raison de ses hautes vertus.
Chasser la bourde reste, en effet, un sport instructif.
D'abord, il dénote l'attention portée par l'auteur à son ours (son manuscrit), de même sa clairvoyance et son goût, et celles, bien entendu du bibliopole son ami.
Mais apprendre à lire réclame une méthode, des modèles, des contre-exemples.
Afin que l'on ne prenne plus certain(e)s graphomanes (à succès ou non) pour des écrivains véritables, nous offrons ici un truc utile qui confine à la lecture critique.

Lire ATTENTIVEMENT ce que l'on a sous les yeux vaut (parfois) leçon.

Démonstration :

Il était naturellement sale de sa personne, mais se lavait pour dissimuler.
Angelo de Sorr (pseud. de Ludovic Sclafer), Le Drame des carrières d’Amérique. — Paris, F. Sartorius, 1868.



Scrogg escalada l’échelle… Mick voulut l’imiter mais fut ramené à terre et au respect filial par sa forte mère et par le fond de sa culotte, qu’elle avait saisi pour passer devant lui.
Jules Cauvain, Le Voleur de diadème (source inconnnue).



Pas mauvais ce café : mais là-bas je le boirai bien meilleur. Le Canada est la terre bénie pour le caféier : il y pousse à ravir.
Eugène Chavette (pseud. d'E. Vachette), La Chasse à l’oncle. — Paris, E. Dentu, 1876, t. II, p. 286.



Je préfère le citoyen libre de l’Amérique au prétentieux bonhomme doublé de cuivre, enregistré classe A1 dans les livres des compagnies d’assurance.
Le Colonel Caoutchouc et ses aventures extraordinaires, traduit de l'anglais par Jean l'Enigme (lui-même). — Paris, Richonnier, s. d. (circa 1905), p. 214.

RAPPEL
« Dents de vautour et mains de serpent » est le titre épatant d'une série d’articles que Régis Messac (1893-1944) confia en 1935 à la revue des Primaires, où il réunissait les plus belles boulettes littéraires en sa possession.
L'exercice est des plus délectable, qui vaut bien le recueil des propos de comptoirs ou les boulettes, bévues et inepties de la gent politique truffant les pages du Canard enchaîné.
Si c'est un fruit remarquable de la frénésie des littérateurs industriels du XIXe siècle, il est à peu près certain qu'aujourd'hui même, et pour d'autres raisons que l'urgence, nous le craignons bien, nos hommes et femmes de plume se laissent aller à quelque glissade occasionnelle, néanmoins effarante.

Aussi nous maintenons notre proposition de créer un Prix de la Boulette contemporaine...
Quoi qu'il en soit, le concours est ouvert, n'hésitez pas à ajouter vos trouvailles !



Voir aussi :
De délectables bourdes (I)

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