
Charles Cros
Qu'un homme, en ce siècle, se soit payé, à défaut du pain quotidien, le luxe d'inventer le phonographe, qu'il ait outré la complaisance envers ses concitoyens ingrats jusqu'à les doter de la photographie des couleurs, et qu'entre temps — avant de mourir — pour charmer le coeur des belles personnes et pour orner l'esprit des jeunes gens, il ait écrit des poèmes durables où se survit son âme intense, c'en est assez, semble-t-il, pour la gloire de son nom. Si quelque période d'oubli survient après cela, on cradrait croire que le temps préparer à la mémoire du poète un suffisant recul d'où sa personnalité surgira légendaire. Tous ceux qui ont gardé le souvenir ému de Charles Cros ne doutent point qu'il en soit ansi pour ce charmant génie aux allures déconcertantes.
Avec Félix Fénéon, Camille de Saint-Croix, L. Marsolleau, Alphonse Allais, Emile Goudeau, Verhaeren, Paul Verlaine, etc., des choses merveilleuses ont été révélées sur le poète et l'inventeur qui contribueront à perpétuer les multiples aspects de sa vie.
Charles Cros, né à Fabrezan (Aude), le 1er octobre 1842, est mort à Paris, le 9 août 1888, d'une décoordination générale des organes. Il a laissé des pages inédites — bien peu nombreuses, hélas ! — Ses poéies posthumes seront très prochainement réunies sous ce titre : "Le Collier de Griffes".
Ceux, pour qui le "Coffret de Santal", son premier volume, fut un événement, et qui tiennent ce livre, avec de spièces comme le Sento, l'Orgue, l'Archet, pur un de splus rares parmi l'abondante effusion littéraire des vingt dernières années, accueilleront sans doute avec la même faveur ces vers sans lendemain du poète, du philosophe, de l'humoriste, et du savant Charles Cros.
Pour exciter quelque ferveur à ce propos, nous offrons dès aujourd'hui, au lecteur, un extrait du "Collier de Griffes".